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Ententes commerciales et tarifs : une proposition échangée entre Ottawa et Washington

Auteur: Fannie Olivier, Louis Blouin (Consulter le profil) Louis Blouin Source: Radio Canada
Juin 11, 2025 at 14:10
Le premier ministre Mark Carney a rencontré le président américain Donald Trump dans le bureau ovale à Washington le 6 mai.  Photo : Getty Images / Anna Moneymaker
Le premier ministre Mark Carney a rencontré le président américain Donald Trump dans le bureau ovale à Washington le 6 mai. Photo : Getty Images / Anna Moneymaker

Les discussions entre Mark Carney et Donald Trump sont assez avancées pour qu’un document contenant une ébauche d’entente économique et sécuritaire ait été échangé entre le bureau du premier ministre et la Maison-Blanche, a appris Radio-Canada.

Le court document – moins de cinq pages – est chiffré, et il trace les contours d’une possible entente économique et sécuritaire entre les deux pays, selon trois sources bien au fait du dossier.

La proposition comprend notamment une participation du Canada au Dôme d’or, ce projet de bouclier antimissile cher au président Trump.

Elle inclut également des investissements en infrastructure pour défendre la souveraineté de l’Arctique. L’augmentation des dépenses en défense permettant au Canada d’atteindre la cible de l’OTAN de 2 % du PIB dès cette année est également mentionnée, tout comme les investissements déjà annoncés par Ottawa pour renforcer la sécurité à la frontière.

En échange, le gouvernement Carney demande la levée de tous les tarifs douaniers que Donald Trump a imposés au Canada depuis son arrivée à la Maison-Blanche.

Selon nos informations, ce document, émanant d’Ottawa, fait des allers-retours entre les mains du gouvernement Carney et celles de l’administration Trump.

Ces discussions prennent du temps, parce qu’il faut s’assurer d’avoir le bon accord, signale une source haut placée. Il s’agit de moments tumultueux, et les choses changent rapidement, indique cette personne, qui constate des progrès dans les discussions depuis une semaine.

Ottawa a intensifié ses efforts ces dernières semaines dans le but d’en arriver à un accord d’ici la tenue du G7 en Alberta du 15 au 17 juin. Le gouvernement canadien tente de faire tomber le mur tarifaire américain qui fait pression sur l’économie canadienne.

 

Deux hommes lèvent le poing et sourient aux photographes de presse.
Mark Carney et Donald Trump à la Maison-Blanche le 6 mai 2025. PHOTO : GETTY IMAGES / AFP / JIM WATSON

 

Une autre source bien au fait des discussions met toutefois en garde contre un excès d’enthousiasme : on n’en est pas encore à la veille d’une entente. L’entourage du premier ministre espère qu’un éventuel tête-à-tête avec le président en marge du sommet du G7 permettra de faire avancer les discussions sur cet accord global.

Invité à commenter le document échangé entre Ottawa et Washington, un porte-parole officiel du gouvernement canadien a indiqué qu’il n’y avait pas d’accord conclu entre les deux pays.

Dans une négociation, il y a beaucoup de documents qui sont échangés, avec différents scénarios hypothétiques, a indiqué ce porte-parole.

Bonne relation Carney-Trump

Selon une troisième source, le courant passe entre Mark Carney et le président Trump, qui ont eu plusieurs échanges directs ces dernières semaines à ce sujet. Les deux politiciens échangent des textos et se passent des coups de fil au cours desquels ils discutent tarifs douaniers, mais aussi enjeux géopolitiques.

Toutefois, même si les échanges sont cordiaux, Ottawa n’écarte pas l’idée de hausser le ton en augmentant les contre-tarifs imposés à l’économie américaine si une entente n’est pas conclue dans la foulée du sommet du G7 la semaine prochaine.

La semaine dernière, Donald Trump a fait passer ses droits de douane sur l’acier et l’aluminium canadiens de 25 % à 50 %. Le gouvernement n’avait pas riposté immédiatement dans l’espoir de laisser de la place à une possible entente. Cela pourrait changer, et Ottawa évalue actuellement plusieurs options pour y répondre.

Le controversé « Dôme d’or »

Mark Carney a signalé à la fin du mois de mai qu’il envisageait de faire adhérer le Canada au « Dôme d’or », un projet de système de défense visant à intercepter les missiles en provenance de pays hostiles.

 

Donald Trump semble regarder une pancarte avec le message « Dôme d'or pour l'Amérique » sous une carte de l'Amérique du Nord où des missiles sont détruits.
Le président américain Donald Trump a fait une annonce concernant le « Dôme d'or » à la Maison-Blanche à Washington, le 20 mai 2025. PHOTO : REUTERS / KEVIN LAMARQUE

Oui, c’est une bonne idée pour le Canada d’avoir une protection contre les missiles, parce qu’à partir de maintenant, il y a de vraies menaces contre le Canada venant de Russie, de Corée du Nord et peut-être de Chine, d’ici un certain temps, avait-il signalé le 27 mai, précisant toutefois que le Canada pourrait choisir de faire cavalier seul.

Le Dôme d’or s’annonce toutefois coûteux. Il est évalué à 175 milliards de dollars américains (243,5 milliards $ CA) par l’administration Trump, mais des experts pensent qu’une facture totale dépassant 500 milliards $ est plus réaliste.

Le 27 mai, le président Trump avait soutenu dans une publication sur les réseaux sociaux que l’adhésion du Canada au Dôme d’or s’élèverait à 61 milliards de dollars. Il avait ajouté que cela ne lui coûterait toutefois rien du tout s’il acceptait de devenir le 51e État américain.

Négociations ardues

Mais les discussions avec l’administration américaine ne sont pas faciles. Le secrétaire au Commerce, Howard Lutnick, soulève toutes sortes de demandes auprès de ses interlocuteurs canadiens. Selon une source, il aurait récemment abordé le système canadien de la gestion de l’offre, les exigences en matière d’affichage en français de la loi 96 au Québec, la taxe sur les services numériques imposée par Ottawa et même la TPS au Canada qui est perçue comme une barrière au commerce entre les deux pays.

Selon cette même source, le gouvernement canadien tente de juger si Howard Lutnick agit comme un électron libre ou si ses demandes reflètent réellement celles de Donald Trump.

À quelques jours du début du sommet, la conclusion d’une entente demeure incertaine. Selon cette source, si elle survient, ce serait le fruit des conversations directes entre le premier ministre et le président.

Avec la collaboration de Katie Simpson

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