Canada

Préparer ses finances pour travailler aux États-Unis

Auteur: MARTINE LETARTE, Collaboration spéciale Source: La Presse Canada
Juillet 27, 2025 at 06:57
PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE / Philippe prévoit partir travailler trois années aux États-Unis avant de revenir s’installer au pays.
PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE / Philippe prévoit partir travailler trois années aux États-Unis avant de revenir s’installer au pays.

Partir travailler dans un autre pays pour quelques années est une expérience enrichissante, mais cela vient aussi avec plusieurs éléments de finances personnelles à gérer. L’idéal, c’est de prendre le temps de s’y préparer et de trouver une personne de confiance pour se faire accompagner.

Philippe*, 31 ans, travaille dans un laboratoire de recherche gouvernemental. Il est en couple avec Sévrine*, 27 ans, une Française qui réalise son doctorat au Québec. Elle se prépare à partir faire un postdoctorat de trois ans aux États-Unis qui lui rapportera 65 000 $ US par année.

Philippe prévoit de quitter son poste et de partir avec elle. Il a l’intention de demander un permis de travail et de se trouver un emploi pour ces trois années. Le couple compte revenir s’installer au Québec par la suite et s’acheter une propriété dans cinq ans.

Philippe, qui gagne 65 000 $ par année, a l’intention de transférer son régime de retraite à prestations déterminées dans un compte de retraite immobilisé (CRI). Il aurait ainsi 40 000 $ qu’il investirait à 80 % dans des actions et à 20 % dans des obligations. Il a également 50 000 $ dans son compte d’épargne libre d’impôt (CELI), avec la même répartition d’actifs, et continue d’y investir 10 000 $ par année.

« Je me demande si je devrais continuer à cotiser à mon CELI pendant que je serai aux États-Unis, dit-il. Est-ce que je ferais mieux d’ouvrir un CELIAPP en prévision de l’achat de notre propriété ? »

Philippe a aussi 10 000 $ dans son compte à opérations et comme il n’a pas déjà son emploi aux États-Unis, il prévoit de piger dedans au départ.

Il s’inquiète toutefois des conséquences de ces trois ans aux États-Unis sur sa retraite. « Est-ce qu’il y aura un impact financier dû au fait que je cesserai de contribuer au Régime de rentes du Québec (RRQ) pendant cette période ? »

LE PORTRAIT FINANCIER

  • Philippe*, 31 ans
  • Salaire annuel : 65 000 $
  • CELI : 50 000 $
  • Fonds de retraite : 40 000 $ qui pourront être déposés dans un CRI

 

Les conseils

C’est une très bonne chose que Philippe et Sévrine se posent ce genre de questions avant de partir, aux yeux de Léa Saadé, vice-présidente régionale, Montréal et Rive-Sud, IG Gestion de patrimoine. « Il y a plusieurs choses auxquelles il faut penser dans une situation comme la leur et il faut être bien accompagné pour s’assurer de faire les choses correctement », affirme-t-elle.

 

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE Léa Saadé, vice-présidente régionale, Montréal et Rive-Sud, IG Gestion de patrimoine
PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE  Léa Saadé, vice-présidente régionale, Montréal et Rive-Sud, IG Gestion de patrimoine

 

Je leur conseille d’ailleurs de chercher tout de suite un comptable professionnel agréé (CPA) qui connaît bien les lois fiscales canadiennes et américaines et qui pourra réaliser leurs déclarations de revenus dans les deux pays.

 Léa Saadé, vice-présidente régionale, Montréal et Rive-Sud, IG Gestion de patrimoine

 

Harmonisation fiscale et des rentes

Le couple devra compter minutieusement les jours qu’il passera aux États-Unis dans l’année où il s’y installera.

« Du moment où ils sont au moins 183 jours dans l’année aux États-Unis, ils sont considérés comme résidents fiscaux, donc ils devront produire une déclaration de revenus là-bas, précise Olivier Mercier, planificateur financier chez IG Gestion de patrimoine. S’ils s’y installent en septembre, ils ne les atteindront pas en 2025, mais en 2026. »

« Une convention a été signée avec les États-Unis et plusieurs autres pays pour assurer une harmonisation fiscale, c’est-à-dire que si les déclarations de revenus sont bien faites et déposées à temps, ils éviteront la double imposition canadienne et américaine », explique Léa Saadé.

Le Bureau des ententes de sécurité sociale de la RRQ permet aussi une harmonisation des régimes de retraite publics de plusieurs pays, dont les États-Unis.

 

Donc, ce qui sera prélevé sur leur paye pour les régimes de retraite publics américains pourra être transféré ici.

 Léa Saadé, vice-présidente régionale, Montréal et Rive-Sud, IG Gestion de patrimoine

 

Philippe doit aussi savoir que pour calculer sa rente à la retraite, le RRQ se base sur la moyenne des revenus admissibles depuis l’âge de 18 ans, mais exclut automatiquement du calcul 15 % des années les moins rémunératrices.

 

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE Olivier Mercier, planificateur financier chez IG Gestion de patrimoine
PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE  Olivier Mercier, planificateur financier chez IG Gestion de patrimoine

 

Ainsi, s’il accumule peu ou rien du tout pour le RRQ pendant ces années, cela pourrait venir réduire légèrement le montant de sa rente. Par contre, s’il a plusieurs années avec des revenus stables, l’impact sera atténué.

 Olivier Mercier, planificateur financier chez IG Gestion de patrimoine

 

Cotiser au maximum dans le CELI avant de partir

Un élément important à savoir avant de quitter le Canada, c’est qu’on ne peut pas cotiser dans son CELI sans être résident canadien.

« Considérant que Philippe ne pourra pas investir dans son CELI lorsqu’il sera aux États-Unis et qu’il n’aura pas non plus de droits de cotisation qui s’accumuleront, il devrait y investir ce qu’il peut d’ici à ce qu’il parte, affirme Olivier Mercier. S’il cotise quand même lorsqu’il est aux États-Unis, ces sommes deviendront des cotisations excédentaires et il devra payer 1 % d’impôt par mois sur la somme cotisée. »

Ouvrir le CELIAPP avant de quitter le pays et cotiser plus tard

Pour le CELIAPP, c’est le contraire ! « Pour l’ouvrir, il faut être résident canadien et ne pas avoir été propriétaire pour les quatre dernières années, mais une fois qu’il est ouvert, on peut cotiser dedans même si on quitte le pays, explique le planificateur financier. C’est donc très important qu’il l’ouvre avant de partir et il pourra cotiser pendant tout le temps où il sera aux États-Unis. »

Pour retirer la somme de son CELIAPP et l’investir dans sa propriété, par contre, il faut être résident canadien.

Transférer le fonds de retraite dans un CRI

Pour le fonds de retraite, l’idée de prendre la somme offerte par l’employeur et de la placer dans un CRI semble être intéressante pour Philippe, aux yeux du planificateur financier. « Comme il a une tolérance au risque assez élevée et qu’il placera cette somme à 80 % dans des actions et à 20 % dans des obligations, il pourra s’attendre à un bon rendement et aussi, plus tard, il pourra contrôler ce qu’il sort comme revenu imposable », explique-t-il.

Par contre, il lui conseille de réfléchir à ce qu’il voudra faire à son retour des États-Unis. « S’il est possible qu’il retourne travailler dans le public, ce serait probablement plus avantageux de garder son fonds de retraite et de continuer à y cotiser plus tard afin de recevoir une rente à sa retraite qui sera assurée pour le restant de sa vie. »

Chercher un emploi avant de partir

Léa Saadé conseille pour sa part à Philippe de commencer à chercher activement dès maintenant un emploi aux États-Unis.

« Plusieurs entrevues d’embauche se font en ligne et s’il explique sa situation, les employeurs comprendront pourquoi il fait sa recherche d’emploi à partir du Canada, explique-t-elle. L’objectif est qu’il puisse travailler rapidement en arrivant pour toucher le moins possible à son fonds d’urgence. »

* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, les prénoms utilisés sont fictifs.

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