À quelques jours de la présidentielle américaine, les marchés semblent escompter une victoire de Donald Trump mardi prochain.
Le dollar américain est en hausse, en progression de près de 4 % depuis un mois face au dollar canadien. Les taux obligataires remontent également depuis la fin septembre puisque le programme de Donald Trump est considéré comme étant plus stimulateur de l’économie et plus inflationniste.
La bourse américaine a gagné 23 % en 2024, ce qui montre clairement que l'élection possible ou probable de Donald Trump ne semble pas toucher négativement les marchés malgré les inquiétudes de plusieurs économistes.
Il faut dire que mardi prochain, les Américains choisiront non seulement une personne pour présider leur pays mais aussi la majorité des membres du Congrès. Dans les circonstances, un Congrès divisé pourrait empêcher Donald Trump ou Kamala Harris de mettre en œuvre l’ensemble de leurs mesures.
Ceux qui s'inquiètent des tarifs que Donald Trump souhaite imposer se rassurent peut-être en imaginant que le Congrès pourrait être divisé. Ceux qui ne veulent pas voir les impôts des plus riches et des entreprises augmenter sous une présidence de Kamala Harris se disent peut-être qu’un Congrès partagé l’empêcherait d’aller de l’avant avec ces changements fiscaux.
Comme le rappelait l’ancien économiste en chef d’UBS Larry Hatheway dans un texte publié par Barron’s le 28 octobre, le rendement des actions et des obligations est déterminé par la croissance économique, par l’inflation, par les taux d’intérêt et par les profits des entreprises bien davantage que par une élection présidentielle.
Les politiques publiques influencent ces éléments fondamentaux de façon moins importante que ce que les politiciens voudraient bien croire, selon cet expert.
Il est toutefois d’avis que les investisseurs auraient tort de sous-estimer l’impact des politiques que Donald Trump veut mettre en œuvre, surtout dans l'éventualité où les républicains auraient le contrôle des deux chambres.
Selon Bloomberg, lors des huit dernières élections présidentielles, la croissance moyenne du S&P 500 a été de 6,6 % dans les six mois qui ont suivi le scrutin, comparativement à 1,5 % au cours des six mois précédents.
Priorité au pouvoir d’achat
La campagne électorale américaine est marquée par une multitude d’insultes et de quolibets, de déclarations incendiaires, de propos racistes et de références particulièrement préoccupantes à la période nazie par le candidat républicain Donald Trump. Pourtant, c’est l’économie et l’inflation qui demeurent la grande préoccupation des Américains.
Comme le signalait Desjardins la semaine dernière dans une note qui portait sur l’élection présidentielle, la situation de l’économie en général (24 %) et le niveau de l’inflation (15 %) sont les questions économiques les plus importantes pour les Américains, selon un sondage Gallup. Parmi les thèmes non économiques, c’est l’immigration qui constitue la préoccupation la plus marquée pour 22 % des citoyens américains, suivie du leadership politique (17 %).
Donald Trump est considéré comme le candidat le plus crédible en matière d’économie, selon plusieurs sondages effectués au cours des derniers mois. Comme c’est le cas un peu partout dans le monde, le niveau d’inflation élevé de 2021 à 2023 a effrité le soutien de la population pour les gouvernements en place.
C’est ce qui s’est passé avec l’administration Biden, qui est assez impopulaire, et cela se répercute sur la candidate démocrate Kamala Harris.
La hausse des prix des logements et des aliments (y compris l’épicerie et la restauration) a été d’un peu plus de 20 % depuis le début de 2021, ce qui est assez imposant étant donné qu’ensemble, ils occupent près de la moitié des dépenses des ménages, souligne Desjardins dans son étude du 4 octobre dernier.
Au cours des dernières semaines, les deux candidats ont donc proposé aux Américains diverses mesures et politiques destinées à améliorer leur pouvoir d’achat ou, du moins, leur l’impression que cela pourrait changer la donne dans leur portefeuille.
Donald Trump mise sur les tarifs douaniers pour améliorer le sort des Américains. Kamala Harris vise surtout la Chine dans sa plateforme électorale. Elle mise davantage sur des mesures ciblées pour aider les ménages.
Voici les principales propositions des deux candidats et les coûts évalués sur 10 ans.
Kamala Harris
Les démocrates évoquent aussi la possibilité de proposer un impôt minimum pour les citoyens dont la valeur nette des avoirs dépasse les 100 millions $ US.
Donald Trump
tarif douanier de 10 à 20 % sur les importations aux États-Unis et de 60 % sur les importations en provenance de la Chine; ces tarifs permettraient, selon Donald Trump, d’améliorer les finances publiques, de financer de nouveaux programmes et de baisser les prix à l’épicerie (gain : 1750 milliards $ US)
reconduction des baisses d’impôt de 2017 (coût : 4000 milliards $ US)
mesures pour faire baisser les prix : augmenter la production d’énergie fossile, alléger la réglementation, mettre fin à « l’immigration illégale » (mesures non chiffrées)
baisse de l’impôt pour les entreprises de 21 à 15 % (coût : 500 milliards $ US)
fin de l’impôt sur les pourboires (coût : de 100 à 200 milliards $ US)
exclusion des revenus de la sécurité sociale sur l’impôt des particuliers (coût : entre 1200 et 1800 milliards $ US)
fin de l’impôt sur les revenus provenant des heures supplémentaires (coût : 1700 milliards $ US)
retrait des crédits d’impôt de l’Inflation Reduction Act (gain : 900 milliards $ US)
Desjardins ajoute dans sa note qu’un plan budgétaire proposé l’hiver dernier par des membres républicains du Congrès tablait sur une baisse des dépenses totales du gouvernement fédéral de 23 % sur dix ans (soit une coupe de 19 milliards $ US). Un tel effort aiderait grandement à financer les baisses d’impôt et à améliorer les finances publiques mais, comme la proposition n’a pas été reprise par Donald Trump et qu’elle semble difficile à appliquer, il serait hasardeux d’en tenir compte.
Donald Trump évoque dans sa plateforme une aide pour les premiers acheteurs de maisons, mais il ne fournit pas de détails. Il évoque aussi l’adoption d’incitatifs fiscaux et l’utilisation de terres fédérales pour de nouvelles constructions.
Tarifs inflationnistes
On doit souligner une fois de plus que les économistes estiment que l’introduction de tarifs douaniers généralisés à la frontière par une nouvelle administration dirigée par Donald Trump aurait un effet néfaste sur l’économie et ferait grimper l’inflation, ce que réfute le candidat républicain.
Desjardins écrit que la Tax Foundation (considérée comme étant de centre‑droite et pro‑entreprises) estime (pour le tarif général de 10 % et de 60 % pour la Chine) que le PIB réel à long terme serait affecté négativement de 0,8 % et que le niveau d’emploi serait inférieur de 674 000, tout cela par rapport au scénario de base. Si l’on ajoute 10 % de plus au tarif général (à 20 %), le PIB à long terme subirait une baisse supplémentaire de 0,5 %, et il y aurait 402 000 emplois de moins. Si, en plus, les autres pays exercent des représailles, il faudrait enlever 0,4 % de plus au PIB à long terme et retrancher 362 000 emplois.
Il est à prévoir que de tels tarifs pourraient mettre en péril l’avenir de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique alors qu’une réévaluation des termes de l’entente est prévue en 2026. Cela pourrait aussi permettre au Canada de se soustraire à d’éventuels tarifs américains lors des négociations.
La politique d'expulsions que Donald Trump promet de mettre en œuvre aurait également des effets économiques négatifs, notamment des conséquences sur les entreprises et sur la production.
Les politiques de Donald Trump qui visent à affaiblir les institutions démocratiques et économiques seraient ruineuses pour les États-Unis et pour les économies globales, selon l’économiste Derek Holt, de la Scotia. Les États-Unis doivent contrôler leurs frontières, mais les politiques extrêmes de Donald Trump en matière d’immigration pourraient endommager gravement l’économie américaine.
Selon Bloomberg, la dette américaine sous Donald Trump pourrait passer de 99 à 116 % du PIB avec l’application des baisses d’impôt. Sous Kamala Harris, le taux atteindrait 109 %.
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