France

Annonces de François Bayrou : désindexation des pensions et révision de l’abattement fiscal, la double peine pour les retraités

Auteur: Frantz Durupt Source: Liberation.fr
Juillet 16, 2025 at 08:40
François Bayrou à Paris, le 15 juillet. (Albert Facelly/Libération)
François Bayrou à Paris, le 15 juillet. (Albert Facelly/Libération)

Le Premier ministre compte demander cet effort d’au moins 3 milliards d’euros dans le cadre de l’«année blanche».


Dès l’entame de son «moment de vérité» budgétaire, ce mardi 15 juillet, François Bayrou s’est voulu rassurant : «En 2026, les retraites ne baisseront pas.» C’était pour mieux expliquer, quelques dizaines de minutes plus tard, qu’elles n’augmenteront pas non plus, en tout cas s’agissant de la retraite de base des retraités du privé et des fonctionnaires. C’est en effet une conséquence de l’«année blanche» annoncée par le Premier ministre, qui se traduira, si son budget est adopté, par une désindexation totale des pensions de retraite vis-à-vis de l’inflation. En très net recul depuis l’année dernière, celle-ci devrait avoisiner les 1 % en 2025, selon les projections de la Banque de France.

En réalité, une désindexation des pensions correspond bien, dans les faits et quoi qu’en dise François Bayrou, à une baisse relative des retraites. Il l’a d’ailleurs reconnu à demi-mot, évoquant «un effort très important […] demandé à tous», mais «temporaire». Laissant ainsi entendre qu’en 2027, s’il est encore aux affaires, la loi sera de nouveau appliquée.

Risque politique considérable

La menace d’une sous-indexation planait de plus en plus concrètement ces dernières semaines au-dessus des 17 millions de retraités. Les organisations syndicales et patronales siégeant au sein du «conclave» sur les retraites s’étaient plus ou moins entendues pour qu’une telle mesure, répétée cinq années de suite, constitue l’essentiel du chemin vers un retour à l’équilibre du régime en 2030. La semaine dernière, la piste était également privilégiée par le comité de suivi des retraites, un groupe d’experts rattaché à Matignon. Sa recommandation est d’opérer une sous-indexation de l’ordre de 1,9 point de PIB au total sur les cinq prochaines années. En 2026, selon ses estimations, une sous-indexation de 0,1 point de PIB représenterait une économie de 300 millions d’euros. Rapportée à 1 % d’inflation, l’économie serait donc de 3 milliards d’euros.

 

Au milieu d’une «année blanche» qui viserait aussi les minima sociaux tel que le RSA ou l’allocation adulte handicapé – mais pas les allocations chômage, déterminées en autonomie par l’Unédic –, cette désindexation des retraites présente un risque politique considérable pour le Premier ministre. Son prédécesseur, Michel Barnier, a été censuré en décembre 2024 par la gauche et surtout le Rassemblement national pour avoir porté jusqu’au bout une mesure de sous-indexation partielle des pensions.

Réviser l’abattement de 10 %

François Bayrou a évoqué une autre mesure potentiellement plus consensuelle, qui consisterait à réviser l’abattement de 10 % dont bénéficient l’ensemble des retraités sur leur revenu déclaré à l’administration fiscale. Si le Premier ministre a ironisé sur le fait que cet abattement pour «frais professionnel» n’a pas de sens dans le cas d’un retraité, son histoire est en fait l’objet de débats. Sur son site internet, l’Unsa explique que le gouvernement de Raymond Barre l’a instauré en 1978 notamment pour compenser le fait que les retraités, contrairement aux actifs, ne peuvent pas sous-déclarer leurs pensions. Autrement dit, ne peuvent pas frauder le fisc.

Cet abattement fiscal a représenté un manque à gagner pour le trésor public de près de 4,5 milliards d’euros en 2023, selon la Cour des comptes. Le Premier ministre a suggéré qu’il soit «remplacé par un forfait annuel». Plus tard dans la soirée, au JT de France 2, le ministre de l’Economie, Eric Lombard a précisé que le montant de ce forfait serait de 2000 euros.

 

Concernés par la CSG

Par ailleurs, le gel des barèmes de la CSG par rapport à l’inflation, qu’a annoncé le Premier ministre, concernerait en tout premier lieu les retraités, qui, contrairement aux salariés, se voient appliquer un taux de CSG variable selon leur niveau de revenus et leur quotient familial. Par exemple, un retraité seul percevant annuellement une pension située entre 16 756 et 26 002 euros s’acquitte d’un taux médian de CSG, 6,6%. A partir de 26 002 euros, il bascule dans le taux normal de 8,3 %. Si les barèmes sont gelés, il est plus facile, avec l’évolution des revenus, de basculer dans le taux supérieur. Mais le gel des pensions de base pourrait paradoxalement neutraliser, en partie, cet effet, puisqu’il aurait pour conséquence de faire stagner une partie des revenus des retraités. Un des enjeux, dès lors, serait de voir comment évoluent les retraites complémentaires, à l’issue d’une négociation Agirc-Arrco qui doit avoir lieu cet automne.

Mise à jour le 16 juillet à midi : ajout de détails sur l’effet du gel de la CSG sur les pensions de retraite.

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