L'économie irlandaise est très dépendante des multinationales américaines du secteur pharmaceutique qui se voient imposer une taxe de 15 %.
L'Irlande risque bien d'être une des premières victimes de l'accord annoncé dimanche soir entre Washington et Bruxelles. Cet accord prévoit notamment que la pharmacie sera soumise à des droits de douane de 15 % aux Etats-Unis. Alors même que l'économie irlandaise est très dépendante des multinationales américaines du secteur.
Attirés par une fiscalité ultra-avantageuse, ces groupes pharmaceutiques tels que Pfizer, Eli Lilly et Johnson & Johnson, mais aussi des géants de la tech comme Apple, Google et Meta, dopent depuis plusieurs décennies les recettes de l'Etat, qui enchaîne les excédents budgétaires.
Autrefois l'un des pays les plus pauvres d'Europe occidentale, l'Irlande a été surnommée le « tigre celtique » pour sa croissance record à partir des années 1990. Une performance obtenue grâce à la mise en place de niveaux de taxes particulièrement faibles sur les entreprises qui venaient s'installer sur le sol de ce pays de 5,4 millions d'habitants.
Mais aujourd'hui, la médaille a son revers. L'économie irlandaise « dépend aujourd'hui fortement des entreprises américaines », pharmaceutiques, de la tech mais aussi du secteur financier, explique à l'AFP Dan O'Brien, économiste en chef du think tank IIEA installé à Dublin.
Et de fait les niveaux de taxe annoncés par Donald Trump, même s'ils sontloin des 200 % un temps envisagés par le locataire de la Maison-Blanche, « risquent de dissuader fortement les entreprises américaines d'implanter en Irlande leurs futures usines », abonde Louis Brennan, professeur d'études commerciales au Trinity College de Dublin.
Pharmacie qui pèse pour la moitié des exportations
Pour l'Irlande, l'impact est potentiellement très important : le secteur pharmaceutique représentait près de la moitié des exportations du pays l'an dernier, à 100 milliards d'euros - dont environ 40 % vers les Etats-Unis. Il emploie directement quelque 50.000 personnes.
Les gros laboratoires, notamment américains, hébergent aussi certains brevets dans le pays pour payer moins d'impôts, ce qui alimente les recettes fiscales. Les taxes « rendront les échanges commerciaux plus coûteux et plus difficiles », déplore de fait le Premier ministre irlandais Micheal Martin.
Avec « des droits de douane sur les produits pharmaceutiques, cela touchera l'activité réelle », et pas seulement la manne fiscale du gouvernement, prévient Andrew Kenningham, de Capital Economics. Même si, selon lui, des droits de 15 % pourraient être absorbés, car « une grande partie des médicaments fabriqués en Irlande sont des produits de marque dont le pays est parfois le seul producteur, comme Botox, Viagra », des produits qui « font une marge énorme ».
La tech en sursis ?
Autre inconnue pour l'avenir, l'économie irlandaise dépend aussi beaucoup de géants de la tech, eux aussi attirés par les avantages fiscaux. Ils ont fait de l'Irlande leur siège européen et y ont transféré une partie de leurs droits de propriété intellectuelle,
Ces entreprises de services ne sont pas directement visées par les droits de douane de Donald Trump, qui concernent avant tout les importations de biens physiques. Mais, rien n'est figé dans le marbre. Par le passé, l'administration américaine a, à plusieurs reprises, qualifié « d'escroquerie » la politique fiscale irlandaise.
Au-delà des droits de douane, la tech pourrait donc être touchée si les Etats-Unis décidaient de modifier leur régime fiscal pour rendre moins attractive l'implantation dans des pays à faible fiscalité, selon Andrew Kenningham, de Capital Economics.
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