Donald Trump fait figure de sauveur suprême pour les Israéliens, au moins pour un temps. Il est parvenu à forcer la main aussi bien à Benyamin Netanyahou qu'au Hamas pour parvenir à un accord sur la libération prévue lundi des 48 otages détenus par les islamistes palestiniens ainsi que sur un cessez-le-feu après plus de deux ans de guerre dévastatrice dans la bande de Gaza transformée en un énorme tas de décombres. Fort de ce succès, Donald Trump s'est vu décerner tous les mérites de cet accord, aussi bien à l'étranger qu'en Israël. Le Premier ministre, en revanche, fait plutôt pâle figure et son rôle ne suscite aucun consensus. Seuls ses partisans au sein du gouvernement l'ont félicité.
Le Forum des familles d'otages, qui regroupe la grande majorité des proches de ceux qui ont été kidnappés, s'est bien gardé de rendre hommage au Premier ministre israélien, voire de mentionner son nom. Le contraste avec les louanges tressées au président américain n'en est que plus saisissant.
« Trump nous a apporté la lumière »
« Depuis son investiture, le président Trump nous a apporté la lumière lors des jours les plus sombres que nous avons vécus », a affirmé ce forum dans un communiqué. Mieux encore : ce Forum a appelé le comité chargé de décerner le prix Nobel de la paix à accorder cette récompense à Donald Trump en expliquant « qu'aucun dirigeant et aucune organisation n'ont contribué à la paix dans le monde comme l'a fait le président américain ».
Einav Zangauker, mère de Matan, un des otages, et figure de proue des familles, a passé sous silence la contribution de Benyamin Netanyahou dans ses multiples interventions dans les médias. Le forum a même appelé le président américain à prononcer un discours « place des otages » lundi à Tel Aviv après une allocution prévue à la Knesset (le Parlement).
Une telle invitation lancée au Premier ministre n'aurait pas manqué de provoquer des remous, voire des réactions hostiles d'une partie de la foule, tant les familles, les dizaines de milliers de manifestants qui se sont réunis chaque samedi à Tel Aviv et la plupart des commentateurs n'ont pas ménagé leurs critiques envers Benyamin Netanyahou.
Le pire pogrom
Le Premier ministre s'est souvent retrouvé accusé de mener la guerre sans vraiment se soucier du sort des otages et d'agir avant tout pour se maintenir au pouvoir. Il s'est notamment refusé à créer une commission d'enquête sur les responsabilités du fiasco du 7 octobre 2023 lorsque les commandos du Hamas ont commis des massacres dans le sud d'Israël en prenant par surprise Tsahal et les services de sécurité. Benyamin Netanyahou a rejeté toutes ces mises en cause et affirmé que ce sont toutes ses décisions militaires et politiques qui ont finalement contraint le Hamas à libérer tous les otages.
Mais de nombreux Israéliens le considèrent comme en partie responsable du pire pogrom de civils juifs depuis la Shoah. Selon des sondages, la coalition au pouvoir, la plus à droite de l'histoire du pays, serait battue si des élections avaient lieu actuellement, alors que les législatives sont normalement prévues d'ici un an.
Bref, la Trumpmania lui fait de l'ombre. Petite anecdote : la municipalité de la petite ville de Kiryat Bialik dans le nord d'Israël a décidé jeudi de donner le nom du président américain à un stade pour lui rendre hommage. En 2019, Donald Trump avait déjà vu son nom donné à une implantation israélienne sur le plateau du Golan pour le remercier d'avoir reconnu la souveraineté israélienne sur cette région conquise par l'Etat Hébreu lors de la guerre de juin 1967.
Pascal Brunel (Correspondant à Tel Aviv)