Venezuela

Venezuela : l’inquiétante agressivité des Etats-Unis

La fin du régime incarné par Nicolas Maduro est souhaitable, pour autant Donald Trump, ne dispose d’aucun mandat pour la précipiter par la force. La désignation, par décret, de cartels comme « organisations terroristes étrangères » ne vaut pas blanc-seing.

Nicolas Maduro devra un jour rendre des comptes aux Vénézuéliens pour les abus de pouvoir dont il s’est rendu coupable au cours d’un règne ponctué d’élections volées, comme il devra rendre des comptes pour l’état désastreux dans lequel il laissera son pays. La fin du régime incarné par l’homme fort de Caracas est souhaitable, pour autant le président des Etats-Unis ne dispose d’aucun mandat pour la précipiter par la force.

Depuis plusieurs semaines, pourtant, Donald Trump multiplie les provocations à l’égard de ce pays. Il s’agit notamment de la destruction, par des frappes ciblées, de six bateaux accusés d’être liés au cartel Tren de Aragua, sans qu’aucune preuve n’ait été présentée. La dernière en date a été perpétrée le 16 octobre.

Le même jour, le président des Etats-Unis a également reconnu avoir autorisé la CIA à opérer clandestinement au Venezuela, ravivant le souvenir du rôle funeste joué par le passé par l’agence de renseignement en Amérique latine.

Cette agressivité avait été annoncée par le déploiement d’une importante flotte au large des côtes du pays, composée de destroyers, de navires d’assaut amphibies et d’un croiseur, et accompagnée par un sous-marin d’attaque nucléaire. Des avions de combat F-35 ont également été positionnés à Porto Rico. Pour la justifier, Donald Trump argue d’une coopération étroite, que ses services de renseignement ne confirment pas, entre le régime vénézuélien et des trafiquants de drogue.

 

Une marche organisée par le gouvernement en soutien au président Nicolas Maduro, à Caracas (Venezuela), le 23 septembre 2025.
Une marche organisée par le gouvernement en soutien au président Nicolas Maduro, à Caracas (Venezuela), le 23 septembre 2025. JESUS VARGAS / AP
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Les frappes américaines, qui ont tué jusqu’à présent une trentaine de personnes, ont ouvert un débat sur leur légalité parce qu’elles n’ont pas fait l’objet du vote préalable par le Congrès d’une autorisation d’usage de la force militaire. Au lieu de défendre ses prérogatives, le Sénat, dominé par les républicains, s’est opposé, le 9 octobre, à une résolution réaffirmant la prééminence constitutionnelle du pouvoir législatif en la matière.

Les libertés prises par Donald Trump sont pourtant problématiques. La désignation, par décret, de cartels comme « organisations terroristes étrangères » ne vaut pas blanc-seing. Une cour d’appel américaine pourtant réputée conservatrice a déjà jugé, en septembre, que les activités criminelles du Tren de Aragua ne peuvent pas être assimilées à des actes de guerre comme une invasion. Un argument avancé par l’administration américaine pour justifier le recours à une loi de 1798, l’Alien Enemies Act, pour expulser des migrants présentés comme membres de ce cartel de la drogue.

Quels que soient les effets catastrophiques du trafic de drogue sur la société américaine, l’armée américaine a bien procédé à des assassinats ciblés en dehors de tout cadre légal, en détruisant les bateaux qui ne présentaient aucune menace directe au lieu de les arraisonner. Consciente de cette faiblesse, la Maison Blanche a fait circuler un projet de loi qui donnerait au président les pleins pouvoirs pour conduire une guerre contre les cartels de la drogue, ainsi que contre tout pays qui les aiderait.

Ce chèque en blanc pourrait ainsi couvrir un activisme guerrier qui ressemble de plus en plus à une tentative de changement de régime par la force à Caracas. Un paradoxe pour un homme qui guignait il y a peu le prix Nobel de la paix et dont l’irruption en politique s’était faite en partie sur la dénonciation des expérimentations hasardeuses, en Afghanistan et en Irak, de la « guerre contre le terrorisme ».

 

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Source: Le Monde
Octobre 17, 2025 at 11:39
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