Guerre de tarif, protectionnisme, révision de l’accord de libre-échange, déportation de masse des immigrants ou hausse du budget de la défense pour atteindre la cible de 2 % de l’OTAN? Le gouvernement Trudeau assure être prêt à toute éventualité, peu importe qui remportera l’élection présidentielle américaine mardi soir.
J'ai tous les numéros de téléphone dont j'ai besoin, lance en boutade le ministre de l’Industrie François-Philippe Champagne. On a les bonnes entrées pour envoyer les bons messages.
Le gouvernement Trudeau, assure-t-il, est mieux préparé qu’il y a huit ans face à l’incertitude entourant les résultats de la présidentielle américaine de mardi.
En 2016, le gouvernement Trudeau avait été pris par surprise par la victoire de Donald Trump. Le bureau du premier ministre, selon certains observateurs, semblait progresser à tâtons pour établir des liens avec les figures républicaines influentes dans l’entourage du nouveau président.
Pas cette fois-ci, assurent des sources gouvernementales : le gouvernement Trudeau a appris de ses erreurs. Des liens avec l’entourage de la vice-présidence Kamala Harris sont bien présents. Justin Trudeau s’est entretenu à quelques reprises avec elle depuis janvier.
Mais surtout, le gouvernement canadien a réactivé ses contacts dans l’entourage de Donald Trump, même s’il y a eu beaucoup de roulement dans sa garde rapprochée depuis quatre ans.
Souper et cocktail
Des sources au sein du gouvernement Trudeau confient à Radio-Canada qu’Ottawa continue d'entretenir des relations cordiales avec l’ancien représentant au Commerce Robert Lighthizer, qui a mené les négociations de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) pour l’administration Trump.
M. Lighthizer pourrait jouer un rôle important au sein d’une prochaine présidence Trump. Peut-être même devenir Secrétaire au Trésor, croit une source au bureau du premier ministre.
Selon nos informations, l’ambassadrice canadienne à Washington, Kirsten Hillman, a invité M. Lighthizer à prendre un verre à plusieurs reprises depuis janvier, et Chrystia Freeland a même soupé avec lui lors d’
Toujours selon nos sources, la fille de Donald Trump, Ivanka, ainsi que son gendre Jared Kushner, ont eu quelques conversations téléphoniques avec la cheffe de cabinet de Justin Trudeau, Katie Telford, au cours des derniers mois, dans le but de reconstruire une relation productive, et ce même si Ivanka Trump et Jared Kushner semblent vouloir rester à l’écart lors de cette course présidentielle.
Toutes les façons sont bonnes de garder une porte d’entrée à la Maison-Blanche, indique une source gouvernementale.
Une nouvelle Équipe Canada a été formée dès le mois de janvier pour établir des contacts avec les organisations républicaines et démocrates. Des ministres du gouvernement libéral ont multiplié les visites aux États-Unis. L’ambassadrice canadienne à Washington a fait jouer ses contacts politiques et économiques pour s’assurer que l’exceptionnalité du Canada est bien comprise.
Des élus américains de tous les horizons politiques et les représentants de plusieurs industries-clés aux États-Unis (acier, aluminium, automobile) ont été courtisés par des ministres et des gens d’affaires canadiens afin d’avoir des alliés au Congrès, au Sénat et à la Maison-Blanche, peu importe qui de Kamala Harris ou de Donald Trump remportera la présidentielle américaine mardi.
Turbulences à l’horizon pour les relations canado-américaines
Les relations canado-américaines feront face à de nombreux défis au cours des prochaines années, peu importe qui sera le gagnant ou la gagnante des élections américaines.
Des changements sont à prévoir dans le commerce continental, avec la révision de l’ACEUM en 2026. Le protectionnisme démocrate ou la perspective de tarifs douaniers de 10 % ou 20 % promis par Donald Trump pourraient avoir un effet néfaste sur de nombreuses industries et sur une hausse des prix pour les consommateurs des deux côtés de la frontière.
Selon une étude de la Banque de développement du Canada (BDC), un droit de douane de 10 % sur les exportations vers les États-Unis retrancherait 7 milliards de dollars au PIB canadien et se traduirait aussi par la baisse d’environ 20 000 emplois au Canada.
Quant à la possibilité d’une grande déportation de masse d’immigrants illégaux en sol américain, cela pourrait chambouler le système d’immigration au Canada.
Le désengagement américain en Ukraine et l’insistance des États-Unis pour qu’Ottawa augmente ses dépenses en défense pour atteindre l’objectif de 2 % de l’OTAN pourraient faire pression sur les coffres de l’État.
Mais le ministre Champagne n'est pas inquiet pour autant.
On a analysé les différents scénarios, puis on est prêt à défendre les intérêts canadiens. Je vous dirais même qu'on est en meilleure position maintenant qu'on l'a jamais été.
Une citation deFrançois-Philippe Champagne, ministre de l'Industrie François-Philippe Champagne
J'ai plus de levier aujourd'hui qu'on en avait à l'époque, assure le ministre, pour répondre aux pressions des américains, tant au niveau économique que politique.
Quand on parle en matière d'énergie, quand on parle en matière de semi-conducteurs, quand on parle par exemple des minéraux critiques ça donne au Canada une meilleure position de négociation, selon lui.
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