À Rio, le “pari” de Jair Bolsonaro n’a pas fonctionné

Source: Le Courier International
Mars 17, 2025 at 09:21
PILAR / OLIVARES/ REUTERS
PILAR / OLIVARES/ REUTERS

L’ancien président a convié ses sympathisants à le rejoindre pour réclamer l’amnistie des condamnés du 8 janvier 2023, mais ils n’étaient pas plus de 20 000 à Copacabana.


Des milliers de sympathisants de Jair Bolsonaro ont pris place dimanche matin sur la plage de Copacabana, à Rio de Janeiro, pour l’écouter réclamer l’amnistie des personnes impliquées dans l’assaut sur la place des Trois-Pouvoirs le 8 janvier 2023. 476 personnes ont été condamnées pour avoir attaqué le Congrès national, le palais présidentiel et le Tribunal suprême fédéral (TSF), rappelle CNN Brésil. Un assaut comparé à celui du 6 janvier 2021 aux États-Unis. L’ancien président brésilien, lui-même accusé de tentative de coup d’État après l’élection de Lula en octobre 2022, était accompagné sur scène de gouverneurs, de députés et de sénateurs.

Il a parlé d’une “histoire inventée”, dénonçant “une petite histoire de coup d’État”. Cité par le Jornal O Sul, l’ex-chef d’État n’aurait “jamais pu imaginer qu’[il y aurait] des réfugiés brésiliens dans le monde entier”. Une référence à ses partisans ayant fui le pays après le 8 janvier, notamment en direction de l’Argentine. Lui en tout cas restera au Brésil, sa “terre promise”, qu’il ne quittera qu’“arrêté ou mort”.

La BBC Brésil souligne qu’avant le rassemblement M. Bolsonaro avait posté une vidéo de femmes condamnées pour leur participation aux événements du 8 janvier 2023, “sans mentionner, cependant, qu’une éventuelle approbation de l’amnistie pourrait lui être directement bénéfique”. Le pasteur Silas Malafaia, organisateur de la manifestation, a qualifié Alexandre de Moraes, juge du TSF, de “criminel” et de “dictateur”. Le magazine Veja constate que, “sous la pression de la justice, Bolsonaro a adopté un ton plus prudent dans ses critiques du Tribunal suprême fédéral […], a évité les attaques personnelles contre les magistrats et n’a mentionné aucune proposition de destitution de Moraes ou du président Luiz Inácio Lula da Silva, se limitant à défendre le pardon judiciaire aux condamnés” du 8 janvier.

L’exemple de Donald Trump

Un sondage de décembre montre que 62 % des Brésiliens s’opposent à une loi d’amnistie pour les putschistes, insiste UOL Noticias. D’après les experts interrogés par le site, le meeting de dimanche n’a pas fait bouger les lignes. Les organisateurs espéraient 500 000 personnes. Les partisans de Bolsonaro n’étaient finalement pas plus de 20 000, selon les estimations du Centre brésilien d’analyse et de planification.

“La manifestation était bien en deçà de la capacité de mobilisation déjà démontrée par le bolsonarisme. C’était un pari qui n’a pas fonctionné et qui a même aidé le gouvernement Lula. À l’approche du procès, cette force politique a tendance à s’évanouir encore plus”, analyse le politologue Marco Antonio Teixeira. “Même les gouverneurs qui ont participé ne se présentaient pas pour défendre un programme, mais pour marquer un point auprès de l’électorat bolsonariste”, ajoute la professeure Silvana Krause, de l’Université fédérale de Rio Grande do Sul.

O Globo a signalé la présence d’une pancarte bien visible derrière l’ex-président, sur les fenêtres d’un immeuble de Copacabana, où étaient inscrits les mots “sans amnistie”. Le journal brésilien remarque que “les alliés du président Luiz Inácio Lula da Silva l’ont utilisé les réseaux sociaux pour ironiser” sur le rassemblement. “Une image vaut mille mots”, a par exemple écrit le sénateur Humberto Costa, du Parti des travailleurs.

“Selon son entourage, Bolsonaro croit vraiment à l’amnistie et au retour au sommet l’année prochaine, inspiré par l’exemple de son idole Donald Trump – l’Américain était présent sous la forme d’une affiche faisant allusion au “fight, fight, fight” qu’il a crié dans la foulée de la tentative d’assassinat [dont il a été victime] l’année dernière”, affirme Folha de São Paulo, qui n’a cependant vu “rien de plus qu’une figure cherchant à se victimiser, se comparant à des femmes âgées condamnées par le juge Moraes”.

Le quotidien s’intéresse plutôt à Tarcísio de Freitas, le gouverneur de São Paulo, potentiel candidat du Parti libéral pour la présidentielle de 2026. “Inutile comme forme de pression sur le Tribunal suprême […], la manifestation vidée de ses partisans […] avait une utilité différente pour le groupe lié à l’ancien président”, note Folha de São Paulo. Le journal observe que le gouverneur a “joué le jeu impossible d’être bolsonariste et modéré en même temps”. Il a porté, comme ses compagnons, le maillot du Brésil, mais il avait choisi la couleur bleue plutôt que le jaune porté par les autres. Une façon de marquer sa différence, car “Tarcísio doit se montrer acceptable pour la grande frange de l’électorat qui rejette Bolsonaro sans nécessairement soutenir Lula”.

Mot clé
Vous n'avez pas utilisé le site Web, Cliquer ici pour maintenir votre état de connexion. Temps d'attente: 60 Secondes