GRAND ENTRETIEN - Professeur émérite de relations internationales à l’université de Chicago, John Mearsheimer dénonce depuis toujours la part de responsabilité des Occidentaux dans la guerre en Ukraine. Il estime que la seule issue possible du conflit passe par l’acceptation des exigences de Poutine.
Par Vincent Jolly, pour Le Figaro Magazine
LE FIGARO MAGAZINE. - Depuis l’annexion de la Crimée en 2014, qu’est-ce qui vous a le plus surpris dans cette guerre que vous avez été l’un des rares à voir venir ?
John MEARSHEIMER. - Deux choses m’ont vraiment surpris, voire choqué. La première, c’est l’invasion de la région de Koursk par les forces ukrainiennes, sur territoire russe, en 2024. Car il faut garder à l’esprit que ce n’est pas une simple « guerre par procuration » : les États-Unis contrôlent, dans les faits, une grande partie de la stratégie ukrainienne. Pendant la guerre froide, l’idée que des forces alliées puissent envahir « la mère Russie » était tout simplement impensable. Dans nos scénarios d’époque, l’Otan n’aurait jamais pris le risque de pousser jusqu’au territoire soviétique par peur d’une escalade nucléaire.
La deuxième surprise, ce sont les attaques ukrainiennes contre la composante aérienne de la triade nucléaire russe – les bombardiers stratégiques – en juin dernier. Tout cela montre à quel…