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Le libre-échange avec les États-Unis, « c’est terminé », affirme Tiff Macklem

Auteur: user avatar admin
Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, s'inquiète de nombreux phénomènes qui risquent de faire dérailler l'économie et de relancer l'inflation. PHOTO : RADIO-CANADA / DENIS WONG
Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, s'inquiète de nombreux phénomènes qui risquent de faire dérailler l'économie et de relancer l'inflation. PHOTO : RADIO-CANADA / DENIS WONG

Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, estime que l’économie canadienne traverse une période de transition structurelle qui générera davantage d’incertitude et de perturbations dans les années à venir.

Le facteur le plus important, c’est les droits de douane américains, bien sûr, mais ce n’est pas le seul facteur, a-t-il souligné en entrevue avec Gérald Fillion à l’émission Zone économie, sur ICI RDI.

L’avènement de l’intelligence artificielle, les conflits mondiaux et les changements climatiques sont autant de phénomènes qui risquent, selon lui, de déstabiliser le fin équilibre qui permet une croissance de l’économie sans flambées des prix, comme celle que nous avons connue durant la pandémie.

Tout ça crée plus de chocs d’offre et ce ne sont pas des choses que la Banque centrale peut vraiment atténuer, prévient Tiff Macklem. Ce n’est pas pour le mieux.

En début d’année, les menaces tarifaires de Donald Trump avaient fait grimper, d’une part, les risques de récession et, de l’autre, ceux d’une escalade des barrières tarifaires qui auraient pu relancer l’inflation.

La Banque du Canada se serait alors retrouvée au centre de pressions qui exercent des forces opposées sur la politique monétaire.

La portée des tarifs douaniers imposés par l’administration américaine a finalement été moins grande que prévu, notamment en raison de l’exemption accordée aux produits qui respectent l’Accord de libre-échange Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM).

C’est en partie ce qui a permis à l’économie canadienne de rebondir au troisième trimestre et d’éviter une récession.


Les droits de douane américains sont sévères pour quelques secteurs, [...] mais pour la plupart des autres biens, le [libre-échange] avec les États-Unis reste en place, note Tiff Macklem.

La banque centrale estime que les produits canadiens exportés aux États-Unis sont sujets à un taux de tarifs moyen de 5,9 %, ce qui classe le Canada parmi les pays les moins affectés par les politiques protectionnistes américaines.

Une importante incertitude quant à la révision de l’ACEUM

Le gouverneur de la Banque du Canada demeure néanmoins sur ses gardes.

La révision à venir de l’ACEUM menace de faire tomber la protection tarifaire offerte à environ 90 % des produits canadiens destinés au sud de la frontière. Déjà, le principal négociateur américain songe à démanteler l’entente tripartiteaux profits d’accords individuels avec le Canada et le Mexique.

Dans une entrevue accordée à Patrice Roy mardi, le premier ministre Mark Carneya prévenu les Canadiens que l’accord de libre-échange risque d’être modifié.

Aux yeux de Tiff Macklem, on ne doit pas s’attendre à une entente qui fasse tomber les tarifs en place. L’époque des échanges commerciaux ouverts avec les États-Unis, c’est terminé, martèle-t-il.

Tiff Macklem en entrevue à Zone économie.
Face à l'incertitude économique actuelle, Tiff Macklem ne veut pas donner d'indices quant à ses prochaines décisions sur le taux directeur.  PHOTO : RADIO-CANADA / DENIS WONG

Dans le contexte, il se garde de donner des indices sur les prochaines décisions de la Banque du Canada. On va prendre les décisions une à la fois, se contente-t-il d’affirmer.

Certains prévisionnistes estiment que, si l’économie canadienne poursuit sur sa lancée, la prochaine variation du taux directeur pourrait être à la hausse.

La plupart des grandes institutions financières s’attendent pour leur part à ce que la Banque du Canada demeure sur les lignes de côtés pendant encore plusieurs mois.

Nous sommes contents avec notre taux directeur, [...] mais si la situation change, on est prêt à réagir, indique Tiff Macklem.

La stabilité des prix comme priorité absolue

Le gouverneur de la Banque du Canada répète régulièrement que sa principale préoccupation est de veiller à la stabilité des prix.

Il est essentiel de maîtriser les anticipations d'inflation, car, si nous ne le faisons pas, rien ne fonctionnera correctement dans l'économie, a-t-il de nouveau souligné mardi, en marge d’un discours devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain.

Après une flambée à plus de 8 % en 2022, l’inflation est retombée près de sa cible de 2 %, où elle se situe depuis plus d’un an.


Le prix du panier d’épicerie est pourtant reparti à la hausse dans les derniers mois. Entre octobre et novembre seulement, le prix des aliments achetés en magasin a bondi de 1,9 % pour porter leur taux d’inflation annuelle à 4,7 %, un record depuis 2023.

Tiff Macklem en entrevue à Zone économie.
Sans gain de productivité, le Canada ne pourra résoudre ses enjeux d'abordabilité, selon le gouverneur de la Banque du Canada.  PHOTO : RADIO-CANADA / DENIS WONG

Pour expliquer le phénomène, Tiff Macklem évoque de nombreux facteurs qui ont fait grimper les coûts à travers la chaîne alimentaire, notamment les mauvaises récoltes dans certaines régions du monde, les effets des tarifs douaniers américains et la hausse des coûts de transport.

Dans les mois à venir, on pense que le taux d’inflation de la nourriture va baisser, assure-t-il.

Il juge toutefois que de nombreux Canadiens continueront de se sentir pris à la gorge par les récentes hausses de prix tant que la productivité n’augmentera pas davantage au pays.

Depuis plusieurs décennies, la production par heure travaillée augmente moins vite au Canada que dans la plupart des économies développées.

On ne va pas résoudre le problème d’abordabilité sans augmenter la productivité, insiste Tiff Macklem.

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