Une juge annule les procès de James Comey et de Letitia James, adversaires de Trump

Sophie-Hélène Lebeuf

Une juge fédérale a rejeté, lundi, les accusations déposées contre l'ancien directeur du FBI James Comey et la procureure générale de l'État de New York, Letitia James, infligeant une défaite au président Donald Trump, qui avait réclamé leur inculpation.

Plusieurs experts avaient exprimé des doutes sur la solidité de la preuve dans ces deux dossiers, mais la juge Cameron Currie a annulé le procès en raison de vices de procédures.

Dans deux décisions distinctes, elle s’est rendue aux arguments des avocats des accusés, qui plaidaient que la nomination de la procureure du district Est de Virginie par intérim, Lindsey Halligan, était illégale.

Comme Mme Halligan n'avait pas l'autorité légale pour présenter l'acte d'accusation, j'accepte la requête de M. Comey et je rejette l'acte d'accusation sous réserve de tous droits, a-t-elle écrit, arrivant à la même conclusion dans la poursuite contre Mme James.

La juge a conclu que cette nomination violait les lois qui limitent la capacité du département de la Justice à nommer des procureurs de haut rang sans l'accord du Sénat.

Le président américain avait personnellement choisi Mme Halligan, qui n'avait aucune expérience comme procureure, après avoir poussé vers la porte son prédécesseur, lui aussi nommé de façon intérimaire.

Selon plusieurs médias américains, l'ancien procureur du district s'était opposé à ce que des poursuites soient lancées contre Letitia James et James Comey, jugeant les éléments présentés trop faibles pour justifier des inculpations.

La juge Currie a rejeté les accusations sous réserve de tous droits, ce qui signifie que le département de la Justice pourrait en déposer de nouvelles.

L'administration Trump, qui pourrait emprunter cette avenue, fera vraisemblablement appel de la décision.

Rompant avec la tradition voulant que le département de la Justice reste indépendant du président, Donald Trump avait publiquement appelé la procureure générale Pam Bondi à poursuivre James Comey, Letitia James et le sénateur démocrate Adam Schiff.

Pam : [...] Rien n’est fait. Qu’est-ce qui se passe avec Comey, Adam "Shifty " Schiff, Leticia [sic]??? Ils sont tous coupables comme pas un […]. Nous ne pouvons plus attendre, cela détruit notre réputation et notre crédibilité. Ils m’ont destitué deux fois et inculpé (cinq fois !) POUR RIEN. JUSTICE DOIT ÊTRE RENDUE, MAINTENANT!!!, avait-il écrit sur sa plateforme Truth Social en septembre dernier.

Il lui avait parallèlement demandé de nommer l'une des conseillères à la Maison-Blanche, Lindsey Halligan – qui faisait auparavant partie de ses avocats personnels – à la tête du bureau des procureurs du district.

La juge a d'ailleurs cité cette publication dans sa décision.

Cinq jours après le message du président– et autant de jours avant l’expiration du délai de prescription de cinq ans pour les crimes allégués qui lui étaient reprochés –, James Comey était inculpé sous deux chefs d’accusation : fausse déclaration devant le Congrès et entrave aux travaux du Congrès.

Letitia James était pour sa part poursuivie sous deux chefs d'accusation, soit fraude bancaire et fausses déclarations. La poursuite avait été lancée quelques jours après celle intentée contre l'ex-directeur du FBI.

Tous deux avaient plaidé non coupables.

Une liste d'« ennemis »

L'un et l'autre sont sur la liste de ceux que Donald Trump perçoit comme des ennemis et qui sont dans le viseur du département de la Justice.

Bête noire du président américain, James Comey dirigeait le FBI au début de l’enquête sur les liens entre la Russie et l’équipe de Donald Trump pendant la campagne présidentielle de 2016. Ce dernier a toujours qualifié cette enquête, qui a fini par être confiée à un procureur spécial, de chasse aux sorcières et de canular.

Letitia James avait de son côté intenté une poursuite civile pour fraude contre lui, ses deux fils aînés et la Trump Organization, accusés d’avoir surestimé la valeur nette des avoirs de cette entreprise dans le but de tromper leurs créanciers. En 2024, Donald Trump a lui-même écopé d’une amende qui a culminé à près d'un demi-milliard de dollars américains avec les intérêts, avant d'être annulée en cour d'appel, en août dernier.

Le département de la Justice a également lancé une poursuite contre l'ancien conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche John Bolton, sous le coup de 18 chefs d'accusation liés à une mauvaise gestion présumée d'informations classifiées.

Plusieurs autres personnes ciblées par Donald Trump se retrouvent en outre au centre d'enquêtes, à des degrés plus ou moins avancés, susceptibles de donner lieu à des poursuites.

Le locataire de la Maison-Blanche a nommé des alliés loyaux jusqu'aux plus hauts niveaux du département de la Justice, y compris des gens qui ont été ses avocats personnels, dont Mme Halligan ainsi que Todd Blanche, le procureur général adjoint.