A l’image de l’élue de Géorgie tombée en disgrâce, plusieurs figures trumpistes ont émis des doutes sur la politique menée par le président américain, trop axée sur l’international à leur goût.
Par Bertrand Bouard avec AFP
était l’une de ses plus ardentes supportrices, celle qui l’avait défendu contre vents et marées, embrassant toutes ses théories conspirationnistes et notamment le vol de l’élection présidentielle de 2020. Donald Trump a pourtant rompu avec fracas la semaine dernière avec l’élue de Géorgie Marjorie Taylor Greene. "Je ne sais pas ce qui arrive à Marjorie, c’est une femme bien. Je pense qu’elle s’est égarée", a-t-il déclaré dans le bureau Ovale avant d’ajouter sur son réseau Truth Social qu’il soutiendrait volontiers un candidat contre elle dans une primaire pour les élections de mi-mandat de 2026, lors desquelles tous les sièges de la Chambre des représentants seront remis en jeu. Et d’ajouter : "Maggie 'la Dingue' ne fait que SE PLAINDRE, SE PLAINDRE, SE PLAINDRE".
L’ombre du dossier Epstein
Le grief du président envers cette alliée des plus zélées, incarnation de la droite la plus radicale, tient pour partie à son insistance à ce que soit publiée l’intégralité du dossier Epstein - Marjorie Taylor Greene fait partie des quatre républicains ayant ajouté leurs voix aux démocrates pour que la Chambre des représentants examine cette semaine une proposition de loi forçant le ministère de la Justice à cette publication. Longtemps rétif à rendre publics ces dossiers relatifs aux abus sexuels perpétrés par le financier new-yorkais, qui s’est suicidé en prison en 2019 et dont il a longtemps été proche, Donald Trump a finalement effectué dimanche l’un de ces revirements dont il est coutumier : "Les républicains de la Chambre devraient voter pour publier le dossier Epstein, parce que nous n’avons rien à cacher et qu’il est temps de mettre ce canular démocrate derrière nous", a-t-il écrit sur Truth Social. "Certains 'membres' du Parti républicain sont 'utilisés', et on ne peut pas laisser cela se produire".
Cette décision apaisera-t-elle la base Maga ? C’est à voir. Car si le dossier Epstein agite celle-ci depuis longtemps, et cristallise ses doutes, il n’est pas le seul. Marjorie Taylor Greene accuse en effet depuis plusieurs semaines le président de consacrer trop de son temps aux questions de politique internationale, au détriment des problématiques des Américains. Une position soutenue par d’autres figures de la base trumpiste, dont l’influent ancien conseiller Steve Bannon, qui notait il y a quelques jours que le président avait reçu la semaine passée des officiels d’Asie centrale, de Hongrie et de Syrie. "Je n’ai pas de problème avec le fait qu’il reçoive le président syrien, mais ensuite, il aurait dû [consacrer une réunion] aux questions domestiques", a-t-il déclaré au New York Times.
Haro sur les visas aux étudiants chinois
D’autres mesures ne passent pas, notamment les visas octroyés à des milliers d’étudiants chinois, alors que Donald Trump avait fait campagne sur la priorité à l’emploi donnée aux Américains. Ce programme, appelé H-1B, a été mis sur pied à la demande d’entreprises de la tech, qui disent ne pas trouver les profils dont elles ont besoin. Donald Trump a à nouveau affirmé la semaine passée qu’il pourrait accorder jusqu’à 600 000 visas par an aux étudiants chinois, faisant réagir le gouverneur de Floride Ron DeSantis : "Pourquoi importerions-nous des travailleurs étrangers alors que nous avons notre propre population dont nous devons prendre soin ?" a-t-il déclaré à des journalistes, selon Florida Politics. Un autre cri d’indignation est venu de… Marjorie Taylor Greene, qui a écrit sur X que ces étudiants prendraient des opportunités aux étudiants américains.
Même discorde quant à l’aide accordée à l’Argentine. Le président a approuvé un plan d’aide de 20 milliards de dollars destiné à stabiliser le peso argentin et déclaré que les États-Unis achèteraient du bœuf argentin, provoquant l’inquiétude de nombreux éleveurs de bétail américains.
Un autre élu républicain dont Marjorie Taylor Greene est proche, Thomas Massie, représentant, comme elle, d’un Etat rural du Sud, le Kentucky, a été le plus virulent, déclarant la semaine dernière sur CNN : "Quand ils protègent les pédophiles, quand ils gaspillent notre budget, quand ils déclenchent des guerres à l’étranger, je suis désolé, mais je ne peux pas être d’accord avec cela." Comme pour Marjorie Taylor Greene, le président s’active pour le défaire lors des élections de mi-mandat.