Pourquoi le nouveau pape Robert Francis Prevost a choisi le prénom de Léon ?

Le choix du prénom d’un pape est toujours symbolique de la « vision » du nouveau pape et de sa future doctrine. L’Américain Robert Francis Prevost, 69 ans, est devenu jeudi le premier pape originaire des États-Unis sous le nom de Léon XIV, a annoncé le Vatican.

Natif de Chicago, ce proche collaborateur de François, discret et réservé, a la réputation au sein de la Curie, le gouvernement du Vatican, d’être un modéré capable de concilier des points de vue divergents. Seulement nommé cardinal en 2023, cet américain aux origines franco-italiennes est aussi titulaire d’un passeport péruvien depuis 2015, pays qu’il a salué dans sa première bénédiction.

Ce dernier a donc choisi un prénom déjà utilisé à 13 reprises par ses prédécesseurs. Mais c’est sûrement le dernier d’entre eux, Léon XIII qui a guidé son choix. Le dernier pape du XIXe siècle et le premier du XXe avait laissé sa marque dans l’histoire de l’Église avec l’encyclique « Rerum Novarum ». Son pontificat est l’un des plus longs de l’histoire, avec ceux de Pie IX et de Jean-Paul II et dura 25 ans et demi de 1878 à 1903.

En cette fin d’un siècle marquée par de nombreuses crises, dans le contexte des bouleversements sociaux, politiques et économiques induits par la Révolution industrielle, le Pape Léon XIII, alors déjà âgé de 81 ans, veut développer une ample réflexion sur la question sociale au sein de l’Église, lui qui est né sous le règne de Napoléon.

Léon XIII, le « pape des ouvriers »

Tout en rejetant l’idéologie socialiste et communiste, Léon XIII ouvre donc la voie à une pensée sociale nouvelle, qui va mettre l’Église catholique à l’écoute des millions de travailleurs à la fois victimes et moteurs d’un système industriel en plein boom. Il devient le « pape des ouvriers » avec cette encyclique « Rerum Novarum », toujours considéré comme le fondement de la doctrine sociale catholique. Léon XIII a aussi dénoncé ironiquement « l’américanisme », qui s’opérait dans l’industrialisation lancée à pleine vitesse outre-Atlantique.

Il rappelait alors le droit des ouvriers à un juste salaire, demande la limitation de la durée du travail et envisage même une intervention de l’état pour défendre les travailleurs. Léon XIII condamne aussi le marxisme comme une « peste mortelle » pour la société. À plusieurs reprises par la suite, les papes s’appuieront sur les anniversaires de cette encyclique pour actualiser la pensée sociale de l’Église.

Pour l’anecdote, Léon 1er dit « le grand » fut celui qui empêcha Attila le Hun de piller Rome en 452 de notre ère. Il est aussi le premier pape dont nous ayons les Sermons, ces textes sont toujours lus généralement lors des grandes fêtes de l’année liturgique, à Noël ou à Pâques. Là aussi, une filiation intéressante.

Charité et amour des autres

Par ailleurs, le nouveau pape est membre de l’ordre de saint Augustin, qui invite à la charité à l’égard des pauvres et l’amour des autres. Il est fortement inscrit dans la filiation de cet ordre. Le nouveau pape Léon XIV a donc lancé logiquement un « appel de paix » jeudi à « tous les peuples », lors de son premier discours depuis le balcon de la basilique Saint-Pierre au Vatican.

Le premier pape américain de l’Histoire a également appelé à « construire des ponts » à travers « le dialogue », appelant à « aller de l’avant » « sans peur, unis, main dans la main avec Dieu et entre nous ». Léon XIV, il y a quelques semaines encore avait dénoncé la vision politique de Donald Trump et son vice-président JD Vance, sur les migrants, à l’instar du pape François, dont il était proche.

JD Vance is wrong: Jesus doesn't ask us to rank our love for others https://t.co/hDKPKuMXmu via @NCRonline

— Robert Prevost (@drprevost) February 3, 2025

« JD Vance a tort : Jésus ne nous demande pas de classer notre amour pour les autres », l’avait-il rappelé à l’ordre, lui le récemment converti au catholicisme. Un message prémonitoire pour celui qui aujourd’hui est devenu pape.