Israël ne vendra plus d’électricité à la bande de Gaza, a annoncé dimanche le ministre israélien de l’Énergie, Eli Cohen. Depuis une semaine, l’État hébreu bloque aussi toute entrée de l’aide humanitaire à Gaza. Ces nouvelles mesures visent à « punir les civils » pour mettre de la pression sur le Hamas, une pratique décriée par les experts consultés par le Devoir.
« Je viens de signer l’ordre d’arrêter immédiatement de fournir l’électricité à la bande de Gaza », a déclaré Eli Cohen dans une courte vidéo, la veille d’une nouvelle série de négociations sur la deuxième phase de l’accord de trêve.
Dans un territoire ravagé par la guerre depuis 17 mois, l’électricité sert principalement à faire fonctionner l’usine de dessalement d’eau, qui fournit de l’eau potable aux Gazaouis, selon François Audet, directeur de l’Institut d’études internationales de Montréal à l’UQAM. En résumé, pour attaquer le Hamas, « on punit les civils », explique le professeur.
Les habitants du territoire palestinien « dépendent entièrement de l’aide humanitaire », continue-t-il. Selon lui, couper l’entrée de cette aide « se rapproche du crime de guerre ».
Cette escalade des moyens de pression serait directement liée à l’arrivée en poste de Donald Trump, puisque le nouveau président américain ne voit pas de problème à utiliser les civils comme levier dans la guerre, explique M. Audet. « Israël ne se fera pas taper sur les doigts parce qu’il punit les habitants », résume-t-il.
Dimanche, l’armée israélienne a aussi affirmé avoir mené une frappe meurtrière dans la bande de Gaza, dans laquelle des combattants « tentaient de cacher un engin explosif », selon elle. Cette nouvelle attaque met à mal la trêve, déjà fragile.
En prévision des négociations
Les nouvelles mesures chercheraient à coincer le Hamas en prévision de la série de négociations qui devrait commencer lundi, selon le professeur de l’UQAM. Les deux parties ne s’entendent pas sur les modalités de la deuxième phase de l’accord de trêve et s’accusent l’une et l’autre d’avoir violé l’accord entré en vigueur le 19 janvier.
Les négociations sur la deuxième phase de l’accord sur la trêve se retrouvent dans une impasse. L’État hébreu réclame que la première phase, censée prendre fin le 2 mars, soit étendue jusqu’à la mi-avril. Il veut aussi que le Hamas quitte le territoire palestinien, que la zone soit démilitarisée et que les derniers otages soient libérés avant de passer à la deuxième phase.
« Nous allons utiliser tous les outils à notre disposition pour ramener tous les otages et assurer que le Hamas ne soit plus à Gaza le jour après » la guerre, a affirmé le ministre israélien de l’Énergie dans sa vidéo publiée dimanche.
De son côté, le Hamas, qui a pris le pouvoir à Gaza en 2007, refuse ces conditions et préfère garder ses otages « comme ultime levier », complète M. Audet. Pour le Hamas, la remise des otages serait un moyen pour Israël d’éviter de respecter ses engagements. On parle notamment de l’imposition d’un cessez-le-feu permanent, du retrait des troupes israéliennes à Gaza, de la réouverture des points de passage pour l’aide humanitaire ainsi que de la levée du blocus.
Israël pointe du doigt cette opposition du Hamas aux conditions proposées par l’État hébreu comme excuse pour imposer le blocage de l’aide humanitaire envoyée à Gaza et la fin de la vente d’électricité au territoire palestinien. « Il ne faut pas perdre de vue le but ultime d’Israël », rétorque le professeur titulaire au Département de sociologie de l’UQAM, Rachad Adamus. « On veut rendre la vie impossible à Gaza. »
Selon lui, certes, les mesures sont un moyen de pression pour les négociations, mais elles s’inscrivent surtout dans l’objectif plus large de l’État hébreu de rendre la vie à Gaza si pénible que ses habitants n’aient pas d’autre choix que de quitter le territoire. « C’est le quotidien des gens qui est visé », souligne-t-il. La coupure de l’électricité n’est « qu’un petit détail dans une catastrophe humaine », juge l’auteur du livre La conquête de la Palestine. De Balfour à Gaza, une guerre de cent ans.
Le Hamas continue d’insister pour la tenue de négociations pour appliquer la deuxième phase le plus rapidement possible. « La fermeture des points de passage menace la vie des malades à Gaza. Il y a une pénurie grave de médicaments, de respirateurs artificiels, de générateurs et d’oxygène », a affirmé un porte-parole du ministère de la Santé, Khalil Al-Dakran.
Avec l’Agence France-Presse
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