À la veille d'un sommet crucial de l'Otan aux Pays-Bas, le président américain a affirmé mardi que l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord, élément central de cette alliance puisqu'il pose le principe de défense mutuelle en cas d'attaque d'un des pays membres, pouvait "s'interpréter de plusieurs façons". Qu'en est-il vraiment ? Éléments de réponse.
C'est une nouvelle petite bombe lâchée par Donald Trump qui sème le trouble parmi ses alliés. Peu avant son arrivée mardi 24 juin au sommet de l'Otan qui se tient à La Haye, le président américain est resté évasif sur l'attitude des États-Unis en cas d'attaque d'un des membres de l'alliance, estimant que l'article 5 du traité était sujet à interprétation.
L'article 5 du traité de l'Otan peut "s'interpréter de plusieurs façons", a-t-il lâché à des journalistes, à propos de ce pilier de l'alliance atlantique. Cet article pose le principe de défense mutuelle : si un pays membre est attaqué, tous les autres doivent se porter à son secours.
En réponse, mardi soir, Mark Rutte, le secrétaire général de l'Oran, s'est voulu rassurant : "Je n'ai pas de doute sur l'engagement" des Américains au sein de l'Otan, a-t-il affirmé.
Ce n'est pas la première fois que Donald Trump semble remettre en cause l'article 5. En mars, le locataire de la Maison Blanche avait émis des doutes sur la solidarité entre les alliés en cas d'agression par un pays tiers.
"Si les États-Unis avaient des problèmes et que nous les appelions, nous dirions : 'Nous avons un problème, la France. Nous avons un problème, quelques autres pays que je ne citerai pas.' Pensez-vous qu’ils vont venir nous protéger ? Ils sont censés le faire. Je n’en suis pas si sûr", avait déclaré le président américain.
"Nous sommes des alliés loyaux et fidèles", avait rapidement réagi le président français, Emmanuel Macron, estimant que la France était en "droit d’attendre la même chose".
L'article 5, "un acte de foi"
Adopté le 4 avril 1949 lors de la signature du traité fondant l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), l’article 5 prévoit "qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs [des membres] survenant en Europe ou en Amérique du Nord sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties".
L'objectif des 12 membres fondateurs est alors de tuer dans l'œuf toute velléité expansionniste du bloc soviétique. Signe que cette dissuasion a fonctionné, l'article 5 n'a jamais été déclenché pendant la guerre froide.
Depuis la création de l'Otan, il n’a été invoqué qu’une seule fois, après les attentats du 11 septembre 2001 sur le World Trade Center, à New York. L'article 5 avait permis de mettre sur pied la coalition qui a participé à la plus grande opération de l'histoire de l’alliance, en Afghanistan.
Le déclenchement de l'article 5 n'est pas automatique. Il fait l'objet d'une discussion entre les alliés, qui doivent s'entendre sur une décision politique à l’unanimité. Ensuite, "l’assistance est fournie conjointement par les alliés. Elle n’est pas nécessairement de nature militaire et elle est fonction des ressources matérielles dont dispose chaque pays. Chaque pays membre est donc libre de déterminer la façon dont il souhaite contribuer", explique l'Otan.
"Cette rédaction assez vague laisse la place à l'appréciation individuelle et cela permet aussi le consensus entre alliés. Quand Trump dit qu'il y a plusieurs interprétations à l'article 5, il a parfaitement raison. L'article 5 est finalement un acte de foi. Il fonctionne dans la mesure où chacune des parties a confiance dans ce qui est dit", décrypte Olivier Kempf, expert de la Fondation pour la recherche stratégique.
Pression sur les alliés
Le flou qui entoure l'article 5 s'explique d'ailleurs par une divergence entre les États-Unis et les Européens remontant au moment de la signature du traité, en 1949. Si le principe d’assistance mutuelle fait alors consensus, Washington refuse de s'engager à intervenir automatiquement en cas d'attaque armée.
"L'histoire politique des États-Unis montre qu'il y a toujours eu une grande réticence américaine à former des alliances. En ce sens, Donald Trump revient à une logique très profonde de la diplomatie américaine depuis deux siècles et demi", affirme Olivier Kempf.
Avec ce nouveau coup de semonce contre l'article 5, Donald Trump montre également à ses électeurs qu'il reste le maître du jeu et accentue la pression sur ses alliés, contraints d'augmenter leurs dépenses militaires.
Lors du sommet de La Haye, les membres de l'Otan se sont engagés à augmenter drastiquement leurs budgets en matière de défense, pour atteindre au moins 5 % de leur PIB à l'horizon 2035 – 3,5 % de dépenses militaires stricto sensu, et 1,5 % pour la sécurité au sens large.
"Je pense que nous assistons à la naissance d'une nouvelle Otan, ce qui signifie une Otan plus équilibrée et une Otan qui a davantage de responsabilités européennes", a estimé le président finlandais, Alexander Stubb, dont le pays a rejoint l'alliance il y a deux ans.
"Les Européens dépendent des Américains pour leur sécurité. Ils sont prêts à tout signer, même si leur prime d'assurance vient de doubler et qu'ils devront acheter du matériel américain. Mais d'un autre côté, le monde est plus dangereux, il est donc assez logique que leur prime d'assurance augmente", analyse Olivier Kempf.
Après avoir régulièrement fustigé les "mauvais payeurs" européens, le président Trump n'a pas caché son enthousiasme, qualifiant de "grande victoire pour tout le monde" l'augmentation des dépenses de défense des alliés. "Nous sommes avec eux jusqu'au bout", a également commenté le président américain.
L'"acte de foi" de l'article 5 semble pour l'instant renouvelé. Dans leur déclaration finale mercredi, les membres de l'Otan ont réaffirmé leur engagement "inébranlable" à se défendre mutuellement en cas d'attaque.
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