Tout en s’autoproclamant, une nouvelle fois, envoyé de Dieu chargé de sauver l’Amérique, Donald Trump est devenu lundi le 47e président des États-Unis, au terme d’une cérémonie de passation de pouvoir qui s’est tenue, exceptionnellement, dans la rotonde du Capitole, à Washington, en raison du froid polaire qui a recouvert la capitale américaine.
En prêtant serment, aux côtés de Joe Biden et devant une foule d’alliés, de dignitaires et d’anciens présidents, dont Bill Clinton, George W. Bush et Barack Obama, le populiste a ainsi scellé son retour spectaculaire à la Maison-Blanche, après une défaite cinglante en 2020 qu’il n’a jamais reconnue.
Dans son discours inaugural, il a aussi donné le ton de son deuxième mandat en annonçant son intention de déclarer, par décrets présidentiels, l’état d’urgence à la frontière pour combattre l’immigration illégale, de renverser les politiques environnementales de son prédécesseur, de relancer la production énergétique du pays, de réduire la taille du gouvernement et d’amorcer une refonte du système économique américain pour protéger les travailleurs et familles américaines.
« J’ai été sauvé par Dieu pour rendre à l’Amérique sa grandeur », a déclaré Donald Trump, en faisant référence à la tentative d’assassinat survenue lors d’un rassemblement politique en Pennsylvanie l’été dernier. « Ma récente élection est un mandat clair pour inverser complètement et totalement une horrible trahison […] et pour rendre au peuple sa foi, sa richesse, sa démocratie et, bien sûr, sa liberté, a-t-il ajouté par la suite. À partir maintenant, le déclin de l’Amérique est terminé ».
Passant de la parole aux actes, Donald Trump a prévenu qu’il allait envoyer l’armée à la frontière sud du pays pour « repousser l’invasion désastreuse », selon lui, du pays, un enjeu cher au populiste et qui a été la pierre angulaire de sa campagne électorale. D’autres décrets vont également mettre fin au droit d’asile, au droit du sol, des mesures entrant en contradiction avec les lois et la constitution américaine et qui devraient être rapidement contestées devant les tribunaux.
Il a également ciblé les cartels de la drogue de l’Amérique latine sur le point d’être considéré comme des « organisations terroristes étrangères » en vertu de la Loi sur les ennemis étrangers datant de 1798. Ce décret permettra aux forces de l’ordre et agences fédérales de dégager des ressources pour réprimer ces gangs criminels et les flux migratoires qu’ils contribuent à animer le long de la frontière.
Les décrets annoncés restent toutefois vagues sur la manière dont le républicain compte réaliser son projet de déportation massive d’immigrants promis à maintes reprises sur le terrain électoral. 11 millions de personnes sans statut se retrouveraient ainsi dans la ligne de mire de la nouvelle administration.
Selon le New York Times, le nouveau gouvernement aurait toutefois l’intention de lancer ses premiers raids contre les immigrations dès cette semaine, dans le cadre d’une opération baptisée « Opération Safeguard » et menée par le Service de l’immigration et des contrôles douaniers du Département de la sécurité intérieure des États-Unis. Près de 300 personnes ayant commis des crimes violents pourraient en faire les frais. Pour commencer.
L’opération vise à créer « un choc et une crainte » au commencement du nouveau mandat de Donald Trump, a précisé Tom Homan, l’ex-directeur de l’agence chargée du contrôle de l’immigration, choix du nouveau président pour occuper le poste de « Tsar des frontières » et responsable des expulsions massives. L’opération devait initialement se jouer dans la ville de Chicago, pour envoyer un message clair aux villes dites sanctuaires où les immigrants sont souvent accueillis. Mais les plans auraient depuis changé en raison des fuites sur l’opération.
Un autre paradigme
« Notre souveraineté sera reconquise, notre sécurité sera restaurée», a déclaré Donald Trump devant le parterre de dignitaires réunis pour témoigner de son assermentation, avant d’appeler à un « rééquilibrage de la balance de la justice » et à la fin de « la militarisation vicieuse, violente et injuste du ministère de la Justice et de notre gouvernement », un message envoyé autant aux émeutiers du 6 janvier 2021 qu’il se prépare, en grande partie, à gracier et à ses opposants politiques menacés de représailles, avec les nouveaux pouvoirs qui sont désormais les siens.
Les craintes sont d’ailleurs réelles à en croire le geste posé par Joe Biden, juste avant de quitter la Maison-Blanche. Dans une décision inédite pour un président, il a décidé de gracier, de manière préventive, plusieurs politiciens et hauts fonctionnaires ayant mené la charge contre Donald Trump dans les dernières années ainsi que quelques membres de sa famille.
Parmi eux se trouve Anthony Fauci, qui a piloté la campagne de santé publique contre la COVID-19, le général à la retraite Mark Milley, qui a dénoncé l’autoritarisme du républicain. Les membres bipartisans du comité parlementaire d’enquête sur l’insurrection lancée contre le Capitole, dont la républicaine Liz Cheney, devenue la bête noire du nouveau président, sont aussi dans la liste.
Donald Trump s’en est offusqué d’ailleurs, dans un discours livré devant ses fidèles après son assermentation, en dénonçant des « grâces accordées à des personnes qui étaient très, très coupables de crimes très graves ». Ces clémences visent à protéger ces personnes d’une possible vendetta judiciaire que le nouvel occupant de la Maison-Blanche laisse planer sur ses détracteurs depuis des mois.
Visées impérialistes
En revenant au pouvoir, Donald Trump n’a pas caché les ambitions impérialistes qu’il souhaite injecter dans sa nouvelle administration, et ce, en invoquant le concept de « destinée manifeste », un concept remontant au XIXe siècle qui affirme l’idée d’expansion de la présence blanche américaine sur l’ensemble du continent nord-américain. Il a promis aussi de « planter [le drapeau américain] sur la planète Mars et assuré qu’il allait « reprendre » le canal de Panama. L’œuvre monumentale, construite par les États-Unis, a été transférée au Panama en 1999, après un accord passé en 1977 avec le président Jimmy Carter. « Un cadeau insensé qui n’aurait jamais dû être fait », selon Donald Trump.
La cérémonie d’investiture du nouveau président s’est déroulée sans entrave ni manifestations autour des bâtiments officiels de la Capitale, placée sous haute surveillance par les forces policières. Tout au plus, plusieurs dizaines de membres du groupe suprémaciste blancs, les Proud Boys, dont l’ex-président Enrique Tarrio a été condamné à 22 ans de prison pour sa participation active à l’insurrection du 6 janvier, sont apparus dans les rues dans les minutes suivant l’assermentation du nouveau président, et ce, pour affirmer qu’ils étaient « fiers d’être de retour » dans la Capitale.
Au commencement de cette nouvelle présidence, près de 60 % des Américains se disent optimistes face au retour de Donald Trump à la Maison-Blanche, soit 4 points de plus que lors de son premier mandat, indique un sondage mené par CBS News et YouGov la semaine dernière. Mais les attentes restent élevées : les électeurs de tous les partis politiques considèrent que le pays est toujours « sur la mauvaise voie à l’horizon 2025 ». Ils sont 62 % chez les démocrates, 70 % chez les républicains et 69 % chez les indépendants, à le croire, selon un sondage du Emerson College dévoilé le 14 janvier dernier.
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