L’abolition des contre-tarifs canadiens sur de nombreux produits américains à partir du 1er septembre promet un répit aux consommateurs, mais les baisses de prix se feront attendre. Après des mois de surtaxes qui ont gonflé la facture d’épicerie, les experts préviennent que les effets se feront sentir graduellement.
Michel Rochette, président pour le Québec du Conseil canadien du commerce de détail, souligne que les effets de la levée des contre-tarifs canadiens sur les produits américains ne seront pas immédiats ni uniformes.
Il risque d’y avoir des changements de prix, mais la durée et le moment ne seront pas identiques pour tous les commerces, explique-t-il, en évoquant des chaînes d’approvisionnement différentes selon les détaillants.
Les marges, déjà très minces dans le secteur, ont subi une forte pression, accentuée par la hausse des coûts de main-d’œuvre et d’énergie, note-t-il.
La demande de transparence aussi a augmenté : les clients veulent savoir d’où viennent les produits. Ça affecte l’écosystème commercial. [...] Les commerçants marchent souvent sur un fil, dit-il.
Parmi les produits visés par des tarifs de 25 %, on retrouve :
Source: Liste complète des produits américains assujettis à des contre-mesures tarifaires
Même si les contre-tarifs ne seront plus en vigueur à partir du 1er septembre, les prix vont parfois devoir attendre l'écoulement des réserves de produits qui avaient été importés avant cette date.
Plusieurs des produits touchés sont non périssables. L’inventaire déjà tarifé doit être écoulé. On s’attend à des baisses de prix peut-être à la fin septembre, début octobre.
Une citation de Sylvain Charlebois, directeur du laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire à l’Université Dalhousie
Si la fin de la guerre tarifaire peut éventuellement ramener une certaine stabilité, M. Charlebois reste prudent quant à la possibilité d’un retour des prix à leur niveau d’avant, préférant parler de diminutions graduelles plutôt que d’un véritable retour en arrière.
Est-ce que les prix vont revenir au niveau d’avant? On ne le sait pas encore, mais on s’attend à des diminutions, dit-il.
En juillet 2025, l’inflation au Canada a atteint 1,7 %, alors que les prix des aliments achetés en magasin ont grimpé de 3,4 %, soit le double du rythme global, selon Statistique Canada.
92 $ par famille canadienne
Entre mai et juin 2025, Ottawa a perçu près de 2,3 milliards $ en revenus douaniers — soit environ 1,5 milliard $ de plus qu’à la même période en 2024.
Très concrètement, c’est environ 92 $ par famille canadienne pour seulement deux mois, souligne Gabriel Giguère, analyste principal en politique publique à l’Institut économique de Montréal (IEDM).
Il insiste sur le fait que ces revenus ne sont pas une manne gratuite pour l’État.
Les tarifs américains font mal aux Américains. C’est une taxe sur les Américains et c’est eux qui la paient. De la même façon, les tarifs mis en place par le gouvernement canadien font mal aux Canadiens.
Une citation de Gabriel Giguère, analyste principal en politique publique, IEDM
Au-delà du prix, ces politiques modifient aussi les habitudes de consommation.
Est-ce que le prix va déterminer le choix de consommation? Oui, mais il y a aussi une part sentimentale liée à l’insatisfaction envers les États-Unis, affirme M. Giguere.
Un sentiment auquel M. Charlebois fait écho.
On s’attend à ce que les gens continuent à valoriser les produits canadiens, peut-être même repousser les produits américains, estime-t-il.
Selon lui, la décision d’Ottawa était nécessaire.
Pour notre inflation alimentaire, c’était vraiment la bonne décision, dit-il.
Globalement, on est plus riche quand on commerce. Les contre-tarifs nuisent aux Canadiens et aux entreprises.
Une citation de Gabriel Giguère, analyste principal en politique publique, IEDM
Devant un supermarché du centre-ville de Toronto, les passants interrogés par Radio-Canada confirment tous la même impression : l’épicerie coûte plus cher depuis le printemps.
Je dépensais environ 200 $ pour l’épicerie, et maintenant j’achète moins, résume Michael.
Nadine ajoute : Oui, les oranges, les pommes, les bananes et d’autres fruits et légumes ont augmenté en prix.
Face à ces hausses et confronté à la guerre commerciale avec les États-Unis, chacun dit avoir tenté de favoriser davantage les produits locaux.
Ça m’a rendu plus conscient de l’achat local. Je pense que c’est une bonne chose qu’on pousse les Canadiens à acheter canadien, explique Carlos.
Magali témoigne du même réflexe. J’essaie d’acheter [des produits] du Canada, idéalement de l’Ontario.
Mais, au bout du compte, le prix reste déterminant.
La plupart n'excluent pas de recommencer à acheter des produits américains si leurs prix baissent.
Ça dépend toujours du budget. Si une orange américaine est moins chère, je vais peut-être la choisir, admet Carlos.
Nadine abonde dans le même sens : C’est du cas par cas. Si c’est beaucoup moins cher d’acheter [un produit] américain, parfois oui, parce que l’argent reste la première priorité.
Magali reconnaît aussi que, pour certains fruits et légumes, ce n’est pas toujours possible de privilégier l’achat local.
Mais, pour certains, l’élan patriotique continue.
J’aime vraiment les produits canadiens, affirme fièrement Michael.
Au final, ces témoignages illustrent que, même si les contre-tarifs ont été coûteux pour les consommateurs, ils ont aussi atteint un de leurs objectifs : rendre les produits américains moins attrayants et encourager, au moins temporairement, un réflexe d’achat canadien.
07/07/2025
<p>Les fiançailles de Taylor Swift et Travis Kelce n'ont pas fait vibrer que les fans : elles secouent aussi la Bourse, le marché de la mode et celui de la...