Une vingtaine de dirigeants de pays émergents est attendue au sommet du groupe à Kazan, mardi et mercredi. Une preuve que le président russe n'est pas entièrement isolé.
Sur les rives de la Volga, dans la ville russe de Kazan où se déroule, mardi et mercredi, le sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), Vladimir Poutine, l'hôte de la réunion va pouvoir pavoiser. Malgré l'absence de poids de son homologue brésilien, Lula, pour des raisons médicales, l'événement rassemble une vingtaine de dirigeants étrangers ou de partenaires. Les présidents chinois, Xi Jinping, et le chef du gouvernement indien, Narendra Modi, seront du voyage. Tout comme le président iranien, Massoud Pezeshkian, celui de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, ou encore le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres.
L'événement « sera sans doute considéré comme un succès diplomatique par le président Poutine et comme une preuve que les Occidentaux ne parviennent pas à isoler la Russie », commente dans une note de recherche William Jackson, économiste spécialiste des marchés émergents chez Capital Economics.
Moteur de croissance
« Les pays de notre association sont essentiellement les moteurs de la croissance économique mondiale. Dans un avenir prévisible, les BRICS seront à l'origine de la principale augmentation du PIB mondial », a affirmé le président russe lors d'un forum économique à Moscou. « La croissance économique des BRICS dépendra de moins en moins de l'influence ou de l'ingérence extérieures », a-t-il ajouté.Il est vrai que ces pays émergents, plus dynamiques que ceux du G7 en termes de croissance économique, prennent de l'importance depuis l'élargissement annoncé l'an passé. Lors du précédent sommet organisé par l'Afrique du Sud, l'Iran, l'Egypte, l'Ethiopie, les Emirats arabes unis et l'Arabie saoudite avaient fait acte de candidature. L'Argentine, un temps intéressée, est revenue sur sa décision en décembre dernier. Mais d'autres pays frappent à la porte comme la Turquie, la Thaïlande, le Vietnam, le Nigeria…
Certes, mais pour l'heure, les dix pays du groupe ne représentent encore que 35 % du PIB mondial. Avec un poids considérable de la Chine. « La Chine est prépondérante puisqu'elle assure à elle seule près de 65 % du PIB des BRICS », souligne Léa Dauphas, cheffe économiste de TAC Economics. Pour Christian de Boissieu, professeur à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, « l'élargissement va se poursuivre », avance-t-il. Mais, à terme, « ce groupe sera confronté au même dilemme que les pays de l'Union européenne. Plus on élargit, plus on fait face à des problèmes de cohérence interne et de leadership », explique-t-il.
A Kazan, il sera d'abord question de coopération financière et de dédollarisation. « Le commerce entre les pays des BRICS se développe bien plus que le commerce mondial. On y constate un essor des échanges bilatéraux. La Russie compense à l'Est et au Sud ses pertes de débouchés à l'Ouest », observe Christian de Boissieu.
Sur ce plan commercial, le yuan est probablement amené à prendre de l'importance dans la facturation des échanges commerciaux. « La Chine a développé des instruments de règlement avec CIPS, un système concurrent de celui qu'utilise l'Occident, Swift. Elle a créé des banques off shore pour la compensation en yuan », observe Léa Dauphas. A l'heure où les BRICS évoquent une monnaie commune, « ce sera probablement le yuan », juge Christian de Boissieu. Même si aujourd'hui, la monnaie chinoise n'est pas totalement convertible. C'est une affaire de long terme.
Des pays disparates
Côté partenariat, Moscou et Téhéran qui ont développé leur relation sur le plan militaire tenteront d'élargir les discussions au domaine économique et commercial. « Le sommet de Kazan devrait accélérer le processus d'un partenariat stratégique entre les deux pays. L'annonce ne devrait intervenir que plus tard », avance Léa Dauphas.
Mais, les BRICS restent des pays disparates, et leur adhésion ne signifie pas qu'ils endossent les positions antioccidentales de la Russie. Les pays continuent d'utiliser leurs relations, soit avec l'Occident, soit avec le nouveau bloc Chine-Russie, comme un moyen de pression pour atteindre leurs objectifs. Que ce soit pour obtenir des technologies clés, du matériel militaire avancé ou une position de force dans les négociations commerciales.
L'éventuelle intégration de la Turquie et de la Thaïlande relève plus « d'une décision économique tactique plutôt qu'une preuve tangible d'un changement de position géopolitique », analyse William Jackson. L'Indonésie a ainsi choisi de ne pas demander son intégration l'an passé. L'Arabie saoudite quant à elle est toujours en train d'examiner son entrée. Pour l'économiste, « cela s'apparente à une forme de refus poli ». D'ailleurs, le prince héritier, Mohammed Ben Salmane, ne sera pas présent à Kazan. Il y sera représenté par son ministre des Affaires étrangères.
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