Un décret présidentiel signé vendredi par le président vient de consacrer le changement qui cherche à donner une image « plus offensive » aux Forces armées américaines et de facto à la place des États-Unis sur la scène internationale.
« Le nom “département de la Guerre” véhicule un message plus fort de préparation et de détermination que celui de “département de la Défense”, qui met l’accent uniquement sur les capacités défensives », résume le document.
Le geste suit la promesse, faite depuis des mois par Donald Trump, d’effacer l’idée de « défense », qui selon lui appartient au vocabulaire des faibles et tient de ce « politiquement correct » promu par le courant « woke » qu’il aime défier, dénigrer et attaquer. « “Département de la Guerre” sonne mieux », a-t-il dit il y a quelques jours.
En ramenant la notion de « guerre » dans la sphère militaire de son gouvernement, le républicain vient ainsi renouer avec une dénomination qui a prévalu aux États-Unis de 1789, année de la création de ce département par George Washington, à 1949, lorsque le Congrès l’a fait entrer dans l’ère de la « défense ».
« Cette décision n’était absolument pas une question de politiquement correct », a toutefois rappelé le spécialiste de l’histoire militaire Richard H. Kohn, professeur à l’Université de la Caroline du Nord, dans les pages du New York Times cette semaine. Elle cherchait dans les faits à embrasser l’élargissement des missions de ce département qui, au-delà de la conduite de la guerre, faisait aussi dans les sphères de la politique étrangère, du renseignement et de la sécurité nationale. Comme c’est encore le cas aujourd’hui.
« Il s’agissait de faire comprendre aux adversaires du pays et au reste du monde que les États-Unis ne cherchaient pas à faire la guerre, mais qu’ils voulaient se défendre, et que si cela nécessitait la guerre, ils avaient quatre grandes armées [l’Armée de terre (US Army), le Corps des marines (US Marine Corps), la Marine (US Navy) et l’Armée de l’air (US Air Force)] » pour le faire, a-t-il ajouté.
Venant d’un politicien qui, depuis sa reprise spectaculaire du pouvoir en janvier dernier, carbure à la controverse, aux coups d’éclat, aux coups de gueule et aux menaces, le changement de nom du département de la Défense en « département de la Guerre » vient certainement allonger une longue liste des réformes promues par son régime, qui cultive quotidiennement ses dérives autoritaires.
Mais il projette aussi, dans la sphère publique (et désormais sémantique), l’image agressive et les capacités de combat d’un pays qui, avec son nouveau président, ne cache plus, non plus, ses ambitions impérialistes.
Président expansionniste
Personne n’a oublié la référence faite par Donald Trump à son retour à Washington au concept de « destinée manifeste », une idée remontant au XIXe siècle selon laquelle les États-Unis ont reçu l’autorisation divine de s’étendre en Amérique du Nord au nom de la civilisation. Elle a été brutalement incarnée par l’ancien président Andrew Jackson dans son asservissement et son déplacement des peuples des Premières Nations sur le continent.
D’ailleurs, le portrait de Jackson, installé par Donald Trump dans la nouvelle décoration pompeuse et aveuglante du Bureau ovale, ne tient certainement pas du hasard, mais plutôt de l’hommage.
Personne n’a oublié non plus le doigt pointé par le républicain dans les premiers jours de sa nouvelle présidence vers le Groenland, territoire qu’il convoite pour sa position stratégique et ses ressources naturelles, vers le canal de Panama, cédé à ce pays de l’Amérique centrale par les États-Unis en 1999, ou encore vers le Canada, que l’ex-vedette de téléréalité rêve de transformer en 51e État du nouvel empire qu’il fantasme.