Alors que Roland-Garros a commencé dimanche, certains espèrent encore mettre la main sur un précieux billet d’entrée pour assister au tournoi. Sauf qu’entre blocages à répétition et bugs, acheter une place sur la plateforme de revente officielle de Roland-Garros se transforme rapidement en parcours du combattant, ouvrant la porte à des transactions frauduleuses.
Après trois semaines de combat acharné, Salomé a réussi à obtenir une place en carré or pour une night session à Roland-Garros. La facture est douloureuse : 140 euros. La Nancéienne de 23 ans n’a guère eu le choix sur la plateforme officielle de revente.
La promesse de cette plateforme est pourtant simple : mettre en relation des passionnés de tennis voulant revendre leur place pour Roland-Garros, souvent achetée longtemps à l’avance, avec d’autres qui souhaitent en acheter au dernier moment. Et cela pour les sessions en journée comme de nuit, des phases de qualification du 16 mai au samedi 7 juin, jour de la finale.
Pour cela, encore faut-il trouver une place à mettre dans son panier, ou même parvenir à esquiver le message de blocage qui apparaît lorsque l’on a trop actualisé la page.
Prendre son mal en patience
Ils sont des milliers de passionnés à s’être frottés à ce système.
Mis en place en 2012, puis étendu en 2016, cette billetterie "rend service auprès des spectateurs à qui on demande de réserver des places plusieurs mois à l’avance", explique Matthieu Bosquet, directeur commercial de la Fédération Française de Tennis (FFT).
Pour beaucoup, ils n’ont simplement pas pu avoir accès à la phase de vente officielle : "Cette année, il fallait être tiré au sort et ça n’a pas été mon cas malheureusement", déplore Maxime, 26 ans.
Déjà venu à Roland-Garros l’année dernière grâce à ce système de rachat de places, l’Auvergnat concède avoir "persévéré une longue journée" avant d’obtenir un billet sur le court Philippe-Chatrier, pour le deuxième tour.
Une réservation de dernière minute qui engendre des coûts supplémentaires, regrette Maxime : "L’inconvénient d’avoir obtenu le billet deux jours avant, c’est que cela m’a coûté assez cher en billets de train, les tarifs de dernière minute n’étant pas donnés."
Le directeur commercial de la FFT admet qu’il y a une forte demande par rapport à l'offre : "Le taux de revente est de quasiment 100 % et il y a plus de 50 000 billets revendus par année."
Les passionnés s’interrogent
Si la billetterie de Roland-Garros affiche complet depuis des semaines pour le tournoi principal, Younès, 20 ans, se montre perplexe : "Les places partent très vite, mais lors des matchs on voit des centaines de places vides." Les spectateurs sont en effet libres de se balader de courts annexes en courts annexes, laissant parfois un court central peu rempli si l’affiche ne séduit pas.
Le site de revente intrigue également : des places s’affichent comme étant disponibles, mais impossible de les ajouter au panier. L’étudiant en informatique détaille : "C’était très bizarre, car je choisissais une date, j’appuyais dessus et une fois que je revenais en arrière, c’était bloqué et il n’y avait plus de places." Découragé, Younès pense abandonner.
Blocages à répétition
Salomé, elle, a même été "bloquée du site, un jour environ, car considérée comme un robot, même après avoir réussi le test Captcha". Un problème dû à des actualisation répétées du site, les internautes étant forcés à se montrer particulièrement vifs pour ne pas manquer une occasion d’acheter une place qui se libérerait.
Elle reconnaît tout de même l’utilité de ce système, qui devrait toutefois être "optimisé".
Les places qui disparaissent aussitôt la page ouverte ont simplement été "prises par quelqu’un d’autre", explique Matthieu Bosquet. Il ajoute que "la FFT met beaucoup de moyens et d’énergie pour lutter contre les robots et privilégier les personnes légitimes et de bonne foi", pour justifier les blocages à répétition.
Une ligne de défense qui ne convainc guère, tant les internautes qui se plaignent d’avoir été bloqués sont nombreux.
Clément, 34 ans, a lui aussi connu cette situation de blocage intempestif. Mais cela ne l’a ne l’a pas arrêté : "Après avoir été bloqué via mon PC, j’ai réussi à obtenir une place avec mon téléphone pour la journée des enfants, donc pas de tournoi, juste quelques practices de joueurs. Et je réessayerai sans relâche pour le week-end du 1er juin."
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Marché noir
Le Lillois avait réussi à se procurer des places en 2017, en les rachetant à des "amis d’amis" sur Facebook. Sur les réseaux sociaux et via les groupes de revente en ligne, le marché noir fleurit et les places se revendent à prix d’or. Certains en ont même fait un vrai business.
Alors, s’il est si compliqué d’acheter une place, comment se fait-il que certains aient pu en acheter des dizaines pour les revendre sur le marché noir ? "Ils se créent plusieurs comptes, car il n’y a pas de contrôle de d’identité", relate Lucien, qui cherche à revendre sa place à prix d’achat.
Un jeu risqué pour l’acheteur. Les arnaques sont en effet nombreuses. Le directeur commercial insiste : le système de revente officiel est d’abord "le seul à commercialiser sur le tournoi", mais surtout "le seul à garantir à 100 % un accès au stade et un remboursement au vendeur", rappelle-t-il.
Matthieu Bosquet défend l’usage de billets nominatifs, qu’il juge "efficaces" pour lutter contre la fraude. Sauf que les usagers peuvent se rencontrer pour transférer leurs places par le biais de l’application, en toute sécurité, d'un compte nominatif à un autre.
Si le marché illégal continue de fonctionner, c’est aussi à cause d’un système de vente "peu avantageux pour le vendeur", estime Lucien.
La Fédération propose de "rembourser le vendeur du billet à 90 % de son prix d’achat et les tarifs de revente sont "encadrés pour éviter que certains ne fassent du bénéfice. La notion de service est importante", précise Matthieu Bosquet.
Lucien déplore de son côté un délai de remboursement qui peut "aller jusqu'au 31 juillet", lui qui voudrait immédiatement le toucher. Matthieu Bosquet affirme que la FFT "essaye le plus possible de rembourser avant" et de "simplifier les démarches".
Mais avec une demande largement supérieure à l’offre, Lucien est certain de pouvoir vendre au prix d’achat en passant par les groupes Facebook. Le marché illégal ne semble donc pas prêt de s’arrêter, si la billetterie de revente officielle ne suit pas.
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