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Les démocrates et la traversée de l’Hudson

Source: Radio Canada
Zohran Mamdani deviendra le 1er janvier le premier maire musulman de la plus grande ville des États-Unis.  Photo : Getty Images / AFP / ANGELINA KATSANIS
Zohran Mamdani deviendra le 1er janvier le premier maire musulman de la plus grande ville des États-Unis. Photo : Getty Images / AFP / ANGELINA KATSANIS

Les démocrates ont remporté des élections à New York, au New Jersey et en Virginie… en misant sur des approches différentes.

Pendant la Révolution américaine, les environs du fleuve Hudson, qui coule des Adirondacks à l’Atlantique, ont été le théâtre de batailles importantes pour la jeune armée des États-Unis.

Mardi soir, ce sont les démocrates qui sont sortis victorieux des luttes électorales qu’ils menaient le long du mythique fleuve. À la mairie de New York, tout comme pour le poste de gouverneur du New Jersey, les victoires démocrates ont été sans équivoque.

Le parti, qui avait bien peu de raisons de célébrer depuis le retour à la Maison-Blanche de Donald Trump à la présidence il y a un an, a aussi obtenu le poste de gouverneur de Virginie et des sièges de juges à la Cour suprême de la Pennsylvanie.

Exactement un an après leurs victoires à la présidence et au Congrès, Donald Trump et ses alliés subissent un premier contrecoup important. En Virginie, par exemple, tous les comtés, même ceux traditionnellement acquis aux républicains, ont bougé en faveur des démocrates.

Au New Jersey, où Donald Trump avait fait d’importantes percées en 2024, la candidate démocrate l’a emporté sur le candidat républicain avec une avance d’environ 13 points.

Un parti, deux stratégies

Puisque nous sommes au New Jersey, revenons au fleuve Hudson, qui sépare cet État de son imposant voisin, New York.

Mardi soir, les démocrates fêtaient sur chaque rive de l'Hudson. Mais la stratégie qui a permis de l’emporter était bien différente selon les berges sur lesquelles on se trouve.

À New York, Zohran Mamdani est passé à l’histoire en devenant le premier musulman à occuper les fonctions de maire. À 34 ans, il est aussi le plus jeune titulaire du poste.

Quasi inconnu des électeurs il y a quelques mois, il a causé la surprise en remportant l’investiture du parti démocrate contre l’ancien gouverneur Andrew Cuomo, qui a décidé de rester dans la course et à la mairie comme indépendant.

'Andrew Cuomo dans une foule. 
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Andrew Cuomo, candidat indépendant à la mairie et ancien gouverneur de New York, salue ses partisans après avoir prononcé son discours de concession lors de sa soirée électorale, à Manhattan, le 4 novembre 2025. Photo : Getty Images / Alexi J. Rosenfeld

La campagne Mamdani, qui comptait des dizaines de milliers de bénévoles actifs dans les cinq arrondissements de la métropole, a mis de l’avant des enjeux, comme l’accès au logement, aux services de garde, à la nourriture ou aux transports.

Taxé de communiste par le président Trump, le nouveau maire se décrit lui-même comme un socialiste, qui appartient à l’aile plus à gauche du Parti démocrate.

Mikie Sherrill, la prochaine gouverneure du New Jersey, a un profil bien différent. Ancienne militaire, elle a été élue à la Chambre des représentants aux élections de mi-mandat de 2018, en faisant chavirer une circonscription rouge. Là-dessus, elle rejoint sa collègue gouverneure de la Virginie, Abigail Spanberger, une ancienne agente de la CIA, qui a aussi été élue dans la vague bleue de 2018.

Pendant la campagne, toutes deux se sont présentées aux électeurs comme des démocrates modérées. Ainsi, contrairement à Zohran Mamdani qui propose un gel des loyers pour affronter la crise du logement, Mikie Sherrill préfère promettre la construction de plus de logements sociaux.

Questionnée sur ce qu’elle pensait du démocrate socialiste briguant la mairie de New York, la candidate Sherill a évité de répondre à la question en affirmant qu’elle ne s’impliquerait pas dans cette course, préférant se concentrer sur ce qui se passe dans son État.

La future gouverneure du New Jersey n’est pas la seule démocrate à avoir tenté de garder ses distances. De nombreux bonzes du parti ont tardé à donner leur appui à Zohran Mamdani dans la lutte qu’il menait à l’ancien gouverneur Cuomo. Même que le leader des démocrates au Sénat, Chuck Schumer, pourtant vivant et votant à New York, refuse encore à ce jour de se ranger derrière le nouveau maire.

Chez les partisans du candidat socialiste, cette distance fait sourciller. On voit bien qu’il y a une manière d’attirer les électeurs, me lançait un militant, tuque jaune de Mamdani sur la tête, dans un bar de Manhattan où l’on diffusait la soirée électorale hier.

Zohran Mamdani vu depuis un téléphone.

Le candidat à la mairie de New York Zohran Mamdani prend la parole lors d'une soirée électorale, au Brooklyn Paramount Theater, le 4 novembre 2025.Photo : Getty Images / AFP / ANGELA WEISS

Mamdani a après tout le mérite d’avoir su rallier le vote de jeunes et de nouveaux électeurs, un appui dont le parti aurait cruellement besoin au niveau national. D’ailleurs, deux millions de New-Yorkais se sont rendus aux urnes, un record en plus de 40 ans. Selon les données présentées par le New York Times, la campagne Mamdani a obtenu 23 points de plus que Kamala Harris dans les secteurs remportés par la candidate démocrate l'année dernière.

Sherrill et Spanberger, de leur côté, peuvent se targuer de s’être imposées dans des territoires qui avaient préféré Donald Trump à Kamala Harris l’an dernier. Prenez le comté de Pasaic, au New Jersey. Donald Trump l’avait emporté par trois points lors de la présidentielle. La marge de Mikie Sherill est de 15 points cette fois-ci.

On peut être un parti comme avant où il y a des messages différents qui existent en parallèle, m’assurait un autre militant, qui juge normal que les stratégies ne soient pas les mêmes d’une région à l’autre du pays. Ce sont presque des pays différents.

En entrevue au réseau CNN, le sénateur Bernie Sanders, fidèle allié de Zohran Mamdani, reconnaissait les divisions profondes qui existent chez les démocrates, tout en soulignant le message qui peut les unir : l’insatisfaction à l’endroit des politiques de Donald Trump.

Entre les démocrates progressistes et modérés, ceux qui sont sortis victorieux de part et d’autre de l'Hudson, un pont peut-il être bâti?

Vu le ton de la course à New York, au cours de laquelle Andrew Cuomo est allé jusqu’à qualifier Zohran Mamdani de menace existentielle et a parlé de guerre civile, le processus ne s’annonce pas être un long fleuve tranquille

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