Dans votre style, vous êtes très libre, vous créez parfois des mots. Est-ce que vous écrivez tout ce qui vous passe par la tête ? Vous ne vous posez pas de limites ?
- Non, c’est spontané. Parfois j’écris des mots parce qu’ils sonnent bien. Je trouve que ça résonne bien avec ma voix, la vibe, la mélodie. Quand je trouve ça stylé, je le laisse. Je n’essaie pas de rendre le texte plus lisse que moi-même. Pour moi, la musique, c’est une vibe, des émotions qu’on transmet. Si mes émotions me disent que je dois poser cette vibe, je le fais.
Dans les thèmes que vous explorez, vous ne vous interdisez rien. Vous parlez, assez facilement de sexualité dans des sons comme “Tous les jours”. Vos textes ne mettent pas nécessairement l’accent sur les relations avec les hommes, ils évoquent aussi beaucoup la sororité, l’ambition, la réussite. Qu’est-ce qui vous donne cette liberté ?
- Dès mes premiers sons, j’ai parlé de sexualité. Pour moi, il n’y avait pas de frein. J’exprimais juste ma manière de vivre, mon lifestyle, avec mes amis, mes copines, et c’était un mood. Et surtout, je trouvais ça original, parce que je n’avais jamais vu d’autres artistes dans le même délire que moi.
Vous vous êtes quand même imposée dans un univers assez masculin. Est-ce que vous y avez réfléchi ?
- Au début, je ne savais pas que ça serait difficile. Je m’en suis rendue compte parce que tout le monde m’alertait et me souhaitait bon courage. Alors que je kiffais ! Il est vrai que j’ai grandi dans un endroit où il y avait beaucoup de garçons. J’ai grandi avec les mêmes codes, donc je les connais bien. J’ai des frères et des amis garçons. Et le fait d’avoir été tôt dans la musique m’a conduite à travailler avec une majorité de mecs : le beatmaker, c’est un mec, l’ingé, c’est un mec. C’est un milieu de mecs et ça ne me pose pas de problème.
Qu’est-ce que votre exposition implique pour votre entourage ?
- L’impact sur ma famille est assez réduit. Mais je fais attention à mes enfants, j’évite de les exposer, parce qu’elles n’ont pas choisi d’être connues. Donc je suis vigilante là-dessus mais, pour le reste, tout va bien.
Est-ce que vous avez une philosophie, une idée des principes d’éducation par rapport à vos filles ? Est-ce qu’il y a des choses que vous voulez leur transmettre ?
- Je suis très proche de mes filles. Je leur préconise l’ouverture d’esprit et surtout l’estime d’elles-mêmes. C’est compliqué, en tant qu’artiste, d’être maman et chanteuse. Avec un enfant, c’était facile, mais avec deux enfants, la gestion est différente. Il faut apprendre à gérer les emplois du temps, travailler la tournée en fonction des enfants, les horaires de l’école, aller voir les maîtresses. J’en apprends tous les jours et heureusement ma mère me soutient. C’est pour ça que j’ai mis cinq ans à revenir en tournée, parce que je voulais profiter de mes enfants, avoir une vie normale.
Qu’entendez-vous par “une vie normale” ?
- Une vie normale, c’est une vie sans rendez-vous tout le temps. C’est quand personne ne te parle de travail. Personne ne te met la pression en te disant quoi faire le lendemain. J’ai un planning de malade. Quand je n’ai plus de planning à respecter, et que j’ai du temps pour moi, je retrouve ma vie normale. Il faut savoir mettre pause. Il faut faire attention. Il y a des moments où je me disais que j’aurais peut-être dû accompagner mes enfants. D’autres où ils m’ont manqué. Parfois je ne les voyais pas pendant une semaine. Ça peut être très dur.
Quand vous avez annoncé en début d’année vos trois concerts à Bercy, les billets étaient sold out en 15 minutes. Vous vous y attendiez ?
- Quand mon tourneur Rémi m’a proposé de faire trois Bercy je me suis dit que je ne pourrais jamais les remplir. Je pensais pouvoir remplir un Bercy en un mois ou deux mois. Du coup, quand on a tout rempli en même pas 15 minutes, j’étais choquée. Je me suis demandé : “Qu’est-ce qu’il se passe ?” Je n’avais pas réalisé. La vision qu’ont les gens de moi et ma perception de la célébrité n’ont rien à voir.
Et comment se sont passées les retrouvailles avec le public ?
- Au début, j’avais le trac, j’avais la pression. Et puis, j’ai eu l’impression de recevoir beaucoup d’amour. Beaucoup de passion de la part du public, surtout des femmes. J’ai senti que les gens me regardaient vraiment, m’écoutaient. Ils ont vécu le son avec moi trois jours de suite.
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