À Yopougon Kouté, un village d’Abidjan en Côte d’Ivoire, la présidentielle s’est déroulée dans le calme, samedi, malgré l’ouverture tardive du centre de vote, due à un retard de livraison du matériel. Des électeurs enthousiastes mais peu nombreux ont défilé au compte goutte pour élire leur nouveau président.
Au bout d'une route sinueuse, un vaste terrain abrite des bâtiments aux toits de taule. Une école municipale transformée en centre de vote, samedi 25 octobre, jour de la présidentielle en Côte d'Ivoire.
Ce matin, à Yopougon Kouté, un village d'Abidjan, de petits groupes se forment devant les salles de classe. Certains piétinent d'impatience.
"Les bureaux devaient ouvrir à 8 h. Il y a du retard, des gens sont arrivés tôt pour voter et ensuite vaquer à leurs occupations. Certains repartent. Ce n'est pas bon" s'agace Soro, 47 ans, les bras croisés en signe de protestation.
À deux jours du scrutin, les autorités avaient indiqué que le matériel électoral ne serait déployé que le matin même de l'élection pour éviter de potentielles actions de vandalisme.
Une heure après l'ouverture prévue du centre de vote, le matériel arrive enfin, à bord d'un bus multicolore. Urnes, isoloirs et bulletins sont répartis à la hâte dans les 11 bureaux électoraux.
“Les jeunes doivent contribuer à leur futur"
Alors que de petites files d'attente se forment, Yves Mangoua, Chasuble gris et badge autour du cou, s'installe à un pupitre dans l’un des bureaux de vote. Cet habitant du quartier est un observateur de la société civile. "Notre rôle est de veiller au bon déroulement du scrutin et de collecter des données sur le vote des jeunes et des femmes", explique-t-il.
Le trentenaire s'est porté volontaire et a suivi une formation auprès du centre ivoirien Ahou pour apporter “sa pierre à l’édifice”, dit-il, et "contribuer à la crédibilité du scrutin".
"Dans notre pays, la contestation des résultats peut provoquer des insurrections armées, c'est ce que nous avons connu en 2011. Nous ne pouvons rester spectateurs, les jeunes doivent contribuer à leur futur".
“Je veux que tout le monde sache que j'ai voté"
Dans les bureaux, les électeurs défilent, selon un rituel bien établi. Une fois l'identité vérifiée par empreinte digitale, le votant choisit le stylo ou l'encre indélébile, s'isole pour faire son choix puis dépose son bulletin dans l'urne.
Cinq candidats figurent sur le bulletin : l'actuel président Alassane Ouattara, les anciens ministres Ahoua Don Melo et Henriette Lagou, l'ex-première dame Simone Ehivet et l'homme d'affaires Jean-Louis Billon.
Une fois ressorti du bureau, son devoir accompli, Cyrille, chemise blanche, exhibe fièrement son index noirci. "J'ai choisi l'encre car je veux que tout le monde sache que j'ai voté" lance-t-il, souriant.
"Si tu ne votes pas un autre candidat va s'imposer à toi" déclare Ange, une jeune électrice. "Je suis contente d'avoir voté pour mon candidat".
Durant la journée, le chef de village fait une apparition pour saluer organisateurs et votants.
"Notre priorité est que les habitants se mobilisent dans la paix et le calme. Nous avons mené des actions dans ce sens" affirme-t-il, sous l'œil de son impressionnante escorte. Un dispositif sécuritaire renforcé car l'élection présidentielle est une journée sensible, indique-t-il.
Affluence atone à Yopougon Kouté
Dans ce village, situé dans une commune réputée favorable à l’opposition, le processus suit son cours dans le calme. Mais les votants se font rares et certains passants affichent leur mécontentement. "Je ne suis pas venu voter, je ne crois pas à ce processus biaisé", lance l’un d’eux, en référence à l’exclusion de plusieurs grandes figures de l'opposition du processus électoral.
Yves, le jeune observateur, ne cache pas sa déception. "Je pensais qu'il y aurait plus d'engouement, en particulier au sein de la jeunesse qui doit être le moteur du changement. Mais je ne regrette pas de m'être impliqué en tant qu'observateur, j'ai appris et vu beaucoup de choses ; je suis fier d'avoir accompli cet acte citoyen", conclut-il.
À l'issue de la journée de vote en Côte d'Ivoire, la Commission électorale indépendante (CEI) aura cinq jours pour dévoiler les résultats provisoires de l'élection présidentielle.